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Mitt Romney promet guerre et fierté aux Américains

[image:1,l]Mitt Romney ne négociera pas avec les talibans, il les vaincra. Barack Obama échange avec l’Iran, et la fenêtre diplomatique se rétrécit. Personne ne s’excuse pour les États-Unis. Nous restons debout face au monde, par la vertu de notre statut exceptionnel.

De beaux discours, de gros problèmes, peu de solutions

Ceci est juste un exemple du genre de rhétorique qui entoure le sujet de la politique étrangère américaine avant l’élection présidentielle de novembre 2012.

L’affaire est plus qu’ennuyeuse, elle devient dangereuse. Elle tend à nous faire sentir plus fort sans offrir de réelles solutions et afin de résoudre les problèmes qui guettent les États-Unis à l’intérieur comme à l’étranger.

Le président en titre est aujourd’hui en face de nombreux dangers : la guerre en Afghanistan qui semble physiquement impossible à gagner et politiquement impossible à perdre ; un Iran qui refuse de se soumettre à la pression américaine concernant son programme nucléaire, face à un Congrès qui presse le président de rentrer en guerre ; un conflit en Syrie qui a bouleversé la planète, tandis que la communauté internationale reste à l’écart, impuissante ; et un État voyou, le Yémen, qui sponsorise les guerriers d’Al-Qaïda dont les ingénieux sous-vêtements piégés sont devenus la peur des voyageurs du monde entier.

Tout ceci doit faire face à un déficit rugissant, un budget militaire réduit, et un public de plus en plus timoré face aux aventures étrangères : voilà l’idée que nous devons nous faire des dilemmes qui occupent Barack Obama actuellement.

Mitt Romney, en campagne, a la voie libre

Bien sûr, Mitt Romney ne rencontre pas de telles contraintes; il peut largement attaquer son adversaire en jouant sur l’orgueil national blessé des Américains, en appelant à une action ferme, sans vraiment considérer toutes les options. Nombreux se souviennent de cette déclaration audacieuse au cours d’un débat entre républicains, pendant les primaires, en Caroline du Sud : « si nous réélisons Barack Obama, l’Iran aura l’arme nucléaire. Si vous élisez Mitt Romney, l’Iran n’aura pas l’arme nucléaire. »

Bien sûr, au moment où la véracité ou la fausseté de cette affirmation sera prouvée, il sera de toute façon trop tard pour changer d’avis.

Mitt Romney a également surpris en appelant la Russie « notre ennemi géopolitique numéro 1 », et a promis de « remettre le compteur à zéro » avec le géant eurasien, à un moment de manœuvres politiques délicates par l’administration, sur le sujet de la défense antimissile.

Lorsque Barack Obama a été surpris par des micros non débranchés, promettant « plus de souplesse » après les élections, Mitt Romney l’a accusé de travailler pour le camp d’en face. Sa campagne a également provoqué de nombreuses sueurs froides chez les modérés du pays lorsque certaines rumeurs ont circulé selon lesquelles John Bolton, ancien ambassadeur combattif de l’ONU, pourrait être dans la courte liste des prétendants au secrétariat d’État. Parmi d’autres choses, John Bolton avait appelé à la dissolution des Nations Unies lorsque ces satanés alliés avaient refusé de reconnaître les États-Unis comme étant la seule vraie puissance mondiale.

Le lourd dossier étranger de Barack Obama

Bien sûr, la politique étrangère du président est loin d’être parfaite : prenez son discours du 1er décembre 2009 à West Point, lorsqu’il a annoncé que l’augmentation des effectifs des troupes américaines en Afghanistan, immédiatement court-circuité par sa promesse de quitter la zone 18 mois plus tard. Jeter un os aux faucons, essayer de calmer les colombes, et ruiner toute chance de succès, tout cela en seulement 30 minutes.

La politisation de la politique étrangère est presqu’inévitable en temps d’élection, et nous ne devrions être ni surpris, ni être choqués par les doigts pointés et les gonflements de poitrine des candidats. Mais une petite dose de réalisme serait tout de même bienvenue dans le débat.

Mitt Romney ne fait que de belles promesses

Mitt Romney peut dire tout ce qu’il veut concernant sa victoire contre les talibans, mais tous ceux qui connaissent un minimum le sujet, le pays et bien entendu les conséquences désastreuses de la guerre, savent que ce n’est tout simplement pas possible. Comme l’a dit le New York Times, même certains conseillers de Mitt Romney plaident pour une négociation.

En tant que vétéran de guerre en Afghanistan, je peux attester de l’impossibilité d’une victoire militaire, même une victoire politique semble actuellement être un rêve lointain. Très probablement, nous emprunterons la route du Vietnam, « déclarant la victoire avant de rentrer à la maison », laissant les pauvres Afghans, une fois de plus, faire face aux conséquences d’une intervention étrangère, sans se soucier de celui qui remportera la Maison Blanche.

L’Iran est un peu plus compliqué. De délicates négociations sont prévues dans les jours qui viennent et les menaces de Mitt Romney pourraient avoir certaines conséquences inattendues. Le président Mahmoud Ahmadinejad pourrait être plus disposé à entamer la discussion avec l’administration actuelle s’il a conscience de celle sur laquelle il peut tomber l’année prochaine.

Parler à l’orgueil et au sentiment de fierté des Américains

La plupart des Américains ne feront pas leur choix sur le sujet de la politique étrangère, l’économie est encore le thème qui dictera leur conduite.

Mais le nationalisme est un remède contre les malheurs domestiques, l’Allemagne de l’après Première Guerre mondiale en est l’exemple le plus frappant.

Le discours de Mitt Romney à Manchester, dans le New Hampshire, le 24 avril dernier, ce discours qui a officiellement lancé la campagne présidentielle, était le témoignage de cette stratégie. Appelé « Une meilleure Amérique démarre ce soir », il offrait une chance et un espoir de fournir une réponse à la colère et à la peur des électeurs.

« Il fut un temps, il n’y a pas si longtemps, lorsque chacun de nous pouvait marcher un peu plus fier, se tenir un peu plus droit, car nous avions un cadeau que personne d’autre dans le monde ne pouvait se partager : nous étions Américains… cela signifiait quelque chose pour chacun de nous. »

En face, Barack Obama appelle au sens de la responsabilité et au sacrifice, un message beaucoup moins vibrant. Mais la rhétorique n’est pas la réalité. Et la posture n’est pas l’action. Nous devons essayer de nous souvenir de cela, dès aujourd’hui et jusqu’en novembre.

Global Post / Adaptation Sybille de Larocque / JOL Press

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