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Antonis Samaras, l’homme de la situation?

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Serait-il l’homme de la situation ? Antonis Samaras, en prenant la tête du nouveau gouvernement de coalition grec, semble représenter l’espoir européen d’une sortie de crise en Grèce.

Défenseur de l’austérité… depuis peu

Si, aujourd’hui, le chef de file de la droite grecque semble prêt à tout pour se soumettre aux exigences de l’Union européenne, Antonis Samaras n’a pas toujours tenu ce discours.

Fermement opposé à l’austérité imposée par les bailleurs de fonds de la Grèce, qui avaient accordé une première aide au pays en mai 2010, Antonis Samaras ne s’est rallié à la rigueur que lorsque la Grèce a frôlé le défaut de paiement, à l’automne 2011.

Après avoir refusé une première alliance avec le Premier ministre de l’époque, George Papandréou, avec qui il partageait sa chambre à l’université de l’Ivy League Amherst College aux Etats-Unis, il a finalement accepté de participer à la coalition proposée par Lucas Papademos, technocrate placé à la tête d’un gouvernement d’union nationale, en échange de nouvelles élections législatives.

Car ce nationaliste et européiste convaincu au long passé politique a mis un certain temps à accepter l’idée de voir la souveraineté de la Grèce réduite, quand bien même sa survie économique en dépendrait. Alors si aujourd’hui il brandit le drapeau de la rigueur, en face d’une Europe impatiente de voir le mauvais élève grec sortir de l’impasse politique, Antonis Samaras a dû laisser murir ses ambitions, modifier son discours et se résoudre à certaines concessions politiques.

Patriote et européiste

Pour autant, et face à une large opposition de gauche représentée par le jeune Alexis Tsipras, fermement opposé au mémorandum européen, Antonis Samaras ne sera pas prêt à tous les sacrifices et compte bien faire preuve de persuasion face aux responsables de l’Union européenne afin d’obtenir l’assouplissement des mesures de rigueur exigées en échange d’un plan de sauvetage de 130 milliards d’euros.

Né le 23 mai 1951 à Athènes dans une vieille famille grecque dont sont issus de nombreux écrivains et hommes politiques, petit-fils de l’écrivain Pénélope Delta, auteur de livres patriotiques, il baigne dans l’amour de la Grèce depuis son enfance et son engagement politique a logiment commencé à la droite de la droite. Il appartient à l’aile conservatrice de Nouvelle Démocratie, parti qu’il dirige depuis 2009.

Après avoir commencé ses études au  Athens College, fondé par son grand-père, il obtient une licence d’économie au Ahmerst College en 1974 et un master d’économie à Harvard en 1976.

Une longue carrière politique

A 61 ans, Antonis Samaras a derrière lui un long et tumultueux parcours politique. Elu député alors qu’il n’avait que 26 ans, il a occupé plusieurs ministères à de nombreuses reprises et siégé également au Parlement européen.

En 1992, alors qu’il est ministre des Affaires étrangères, il doit quitter le gouvernement après la controverse sur le nom que devra porter la Macédoine voisine, à la suite de son indépendance. Après avoir fait chuter sa majorité, il quitte Nouvelle Démocratie pour créer une nouvelle formation, « le Printemps politique », positionné plus à droite. Le parti ne parviendra jamais à véritablement percer dans les urnes.

Ce n’est qu’en 2005 qu’il décide de réintégrer Nouvelle Démocratie, avant d’en prendre la tête en 2009. Il effectue alors un large virage à droite et se positionne fermement sur les thèmes de la sécurité et de l’immigration. On lui doit notamment cette célèbre sortie : « Il y a une masse d’immigrés, ils sont un million et demi qui n’ont pas de travail, qui n’ont rien à faire ici ».

La crédibilité de Nouvelle Démocratie est alors fragilisée et ils sont nombreux, en Europe, à douter des capacités d’Antonis Samaras à résoudre la crise à laquelle doit faire face la Grèce.

Quelques années et quelques revirements de situation plus tard, il est le favori des responsables de l’Union européenne pour reprendre les rênes d’une Grèce à la dérive.

Le nouvel homme à abattre : Alexis Tsipras

Le 6 mai 2011, lors des élections législatives qu’il avait lui-même réclamé, Antonis Samaras arrive en tête du scrutin, de justesse. Les Grecs lassés par tant d’austérité ont largement désavoué les partis traditionnels grecs, leur préférant les extrêmes incarnées par Alexis Tsipras, du parti de gauche radicale Syriza, les communistes du KKE ou encore les extrémistes de droite d’Aube Dorée.

Face à l’impossibilité d’aboutir à la formation d’un gouvernement, de nouvelles élections sont organisées quelques semaines plus tard. Entre le 6 mai et le 17 juin, ayant compris que l’homme à abattre n’était plus son rival de gauche, Evangelos Venizelos, chef du Pasok, Antonis Samaras change à nouveau de discours. Toujours favorable à la rigueur imposée par l’Union européenne, il s’engage néanmoins à tout mettre en œuvre pour assouplir les mesures exigées. Il affirme notamment qu’il ne baissera ni les salaires, ni les pensions de retraite et que les coupes budgétaires que la Grèce doit réaliser seront étalées dans le temps.

Changements de stratégie pour accéder au pouvoir

Pour de nombreux analystes politiques, les changements de discours successifs d’Antonis Samaras ont été motivés par son ambition politique incontrôlable. Un temps défavorable aux mesures de rigueur, il n’aurait tenu ce discours que dans le but de déstabiliser son adversaire politique du Pasok. Il n’aurait soutenu le programme européen qu’au moment où ces idées seraient devenues stratégiquement intéressantes pour accéder au pouvoir.

Néanmoins, Antonis Samaras, après avoir prêté serment, mercredi 20 juin, doit désormais respecter les nombreux engagements qu’il a pris, tant devant l’Europe que devant les Grecs, et aucun changement de discours ne lui sera autorisé.

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