Site icon La Revue Internationale

Moshe Feiglin, théocrate ambitieux, nouvelle figure de l’extrême droite

2376568791_718978e8b7_z.jpg2376568791_718978e8b7_z.jpg

[image:1,l]

Yehudit Manhigut, le Tea Party israélien ?

Mardi dernier, le parti de centre-droit Kadima a plongé le monde politique israélien dans l’incertitude, en se retirant du gouvernement de coalition.

Ce qui signifie que l’avenir du Premier ministre Benjamin Netanyahou repose sur le maintien de son hargneuse coalition de droite. Une coalition qui dépend en grande partie d’un homme : Moshe Feiglin. Un membre non conventionnel du Likoud (parti de Benjamin Netanyahou), qui a souvent été comparé (lui-même l’a déclaré) au Tea Party américain.

« Moshe Feiglin est un cheval de Troie au sein du Likoud », a déclaré Yossi Klein Helevi, un érudit membre de l’institut Shalom Hartman à Jérusalem, et un partisan de l’aile droite israélienne. « Et Netanyahu le traite comme tel. »

Moshe Feiglin, 50 ans, père de cinq enfants et grand père de quatre petits-enfants est un personnage saisissant. Grand, pâle et mince, ce passionné de cyclisme s’exprime avec calme et précision. C’est un homme inflexible. Ses objectifs sont de participer activement à la vie politique, et de faire valoir sa vision « messianique » des choses.

Il n’est d’ailleurs pas timide au sujet de son ambition : « Oui, je veux être Premier ministre », a-t-il annoncé à nos partenaires de Global Post.
En attendant, il dirige avec une grande constance son mouvement, le Yehudit Manhigut, en français le « leadership juif ». Il est de ce fait très actif sur Twitter et Facebook.

Israël, un État juif avant tout

Pour lui, Israël est un État juif, un point c’est tout. Dans cet état, les non juifs doivent bénéficier des droits de l’homme, mais pas des droits civils« Si les arabes veulent avoir le droit de voter pour un parlement national, ils doivent le faire dans un État arabe. Qui a dit qu’un non-juif devrait voter à la Knesset d’Israël ? »

En utilisant des termes qui devraient rappeler quelque chose aux observateurs de la campagne de Mitt RomneyFeiglin explique que les Palestiniens devrait être encouragés à « s’auto expulser » grâce à des aides économiques de la part d’Israel. « Un bien meilleur investissement quand on voit tout l’argent gaspillé à maintenir les accords d’Oslo », ajoute-t-il.

Les non juifs, qui ne possèdent pas la citoyenneté israélienne mais vivent dans le pays devraient se voir accorder des « permis de résidence », mais pas de cartes d’identités nationales. Feiglin estime qu’Israël commet une erreur à ne pas réclamer (même militairement) la totalité du territoire biblique de la région. Il se moque également de ceux qui s’interrogent sur la façon dont les résidents non juifs subsisteraient.

[image:2,l]

Selon Feiglinil n’existe pas de « Peuple Palestinien ». « La plupart de ces gens est venue après la seconde Aliyah (l’acte d’immigration pour un juif) », déclare-t-il, en se référant à une vague d’immigration du début du XXème siècle, où 40 000 juifs avaient fui les pogroms russes« Ils sont venus ici en cherchant la richesse et le succès ».

La volonté d’une démocratie « à la carte »

« La démocratie n’est pas une religion », dit-il, en préconisant un modèle à la carte, dans lequel certains aspects de la démocratie seraient maintenus et d’autre rejetés car incompatibles avec « les objectifs juifs » de l’État.

Lors des dernières primaires du Likoud, Feiglin a été élu à la 19ème position sur la liste du parti, lui garantissant un siège au parlement d’Israël, la Knesset.

Les manœuvres douteuses et inexpliquées de Netanyahou ont ensuite placé Feiglin à la 36ème place, s’assurant qu’il ne serait pas une force législative.

Lors de cette course pour la direction du parti (il y a six mois de cela), Feiglin avait recueilli 25% des votes, mais il affirme que ces chiffres ont été trafiqués à son dépend.

Une mouvance de plus en plus puissante

Gideon Rahat, professeur de sciences politiques à l’Université hébraïque de Jérusalem, et expert ​​des partis politiques israéliens, a déclaré que Moshe Feiglin et ses associés (que l’on appelle désormais les « Feiglins ») avaient désormais beaucoup de pouvoir au sein du parti Likoud.

« Ils sont une large majorité, avec une influence notable sur les primaires. Ils peuvent obtenir de bonnes places sur la liste du parti, et forcer Netanyahou à les nommer comme ministres », dit-il.

Klein Halevi explique que les Feiglins sont « des théocrates anti-démocratiques, qui font semblant de faire partie de la tradition politique du Likoud. Mais en fait, ils reflètent le contraire des vraies racines du Likoud. Feiglin combine à la fois un fascisme à tendance révisionniste, et une sorte de désir d’un âge d’or théocratique, venu d’un passé lointain. C’est une combinaison très dangereuse. »

Netanyahou, dans le collimateur des « Feiglins »

Le fait que Netanyahu accepte les principes du Parti travailliste, qui propose une solution à deux Etats, ainsi que son acquiescement à l’abandon du territoire Cisjordanie est devenu la force motrice des Feiglins, qui y sont farouchement opposés.

« C’est un tremblement de terre au sein de la droite israélienne », explique Klein Halevi« A l’étranger, on perçoit cela à tort comme un jeu tactique. Mais au sein de son parti – qui prend l’idéologie très au sérieux – le volte-face drastique de Benjamin Netanyahou a été vécu comme un véritable bouleversement idéologique. »

[image:3,l]

Beaucoup pensent que le Premier ministre, ainsi que plusieurs responsables du Likoud, ont initialement sous-estimé la force de la sécession de Moshé Feiglin.

Gideon Rahat résume cette hypothèse : « Je pensais qu’ils se seraient débarrassés de lui depuis longtemps. […] Il ne représente pas leurs idées. De toute évidence, ils ne se sont pas chargés de lui et maintenant ils en payent le prix. Un jour, Feiglin et ses partisans pourront très bien prendre le Likoud de l’intérieur. »

Moshé Feiglin, qui semble savourer sa nouvelle influence politique, reste un acteur imprévisible de la scène politique nationale israélienne. Ses idées ne coïncident que très difficilement avec les autres figures de la droite. Ainsi, Avigdor Lieberman, s’il partage ses opinions sur la nécessité de renforcer l’emprise d’Israël sur la Cisjordanie, est beaucoup plus religieux que Moshé Feiglin.

La liberté avant tout

Comme le Tea Party aux Etats-Unis, Moshe Feiglin brandit le drapeau de la liberté. Dans son État juif, il préconise l’abolition de tous les partis et lois religieuses. Il s’oppose, en fait, à toute forme de coercition, y compris militaire.

« Je crois que les gens doivent être responsables d’eux-mêmes», a-t-il déclaré. « Je parle de liberté, pas d’évasion. La liberté sans responsabilité conduit toujours à l’esclavage comme le socialisme, le communisme. Elle se termine dans un Goulag. La liberté avec des responsabilités est une chose entièrement différente. Chaque individu véritablement libre est entièrement responsable de son propre destin ».

Global Post/ Adaptation Henri Lahera pour JOL Press

Quitter la version mobile