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Lakhdar Brahimi, vétéran musulman, dernier espoir pour la Syrie

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Qui d’autre pouvait succéder à Kofi Annan sur le dossier syrien sinon un expert incontesté de la diplomatie. Son nom circulait depuis plusieurs semaines, Lakhdar Brahimi a été officiellement nommé médiateur international pour la Syrie, vendredi 17 août, lors d’une conférence donnée à New York par le porte-parole de l’ONU, Eduardo del Buey.

Un diplomate chevronné pour régler la crise syrienne

Pour régler une crise aussi sensible que celle de la Syrie, crise que même Kofi Annan, mondialement reconnu pour ses grandes qualités diplomatiques, a échoué à résoudre, les Nations Unies misent sur un homme d’expérience et de terrain qui a déjà montré son talent lors de nombreux conflits mondiaux.

« Le secrétaire général (de l’ONU, Ban Ki-moon, ndlr) apprécie la volonté de M. Brahimi d’apporter son talent et son expérience extraordinaire à cette mission cruciale et s’attend à un soutien fort, net et uni de la communauté internationale, notamment du Conseil de sécurité, » a déclaré le porte-parole de l’ONU.

Pour parvenir à ses fins en Syrie, Lakhdar Brahimi devra témoigner de ce talent qu’on lui prête et réunir toute l’expérience qu’il a acquise durant ses nombreuses années de diplomate chevronné.

Une mission impossible ?

Pourtant, Lakdhar Brahimi ne part pas confiant et l’échec de Kofi Annan, là où il devra réussir, ne le rassure pas. Dans une interview donnée à France 24, Lakhdar Brahimi a confié ses doutes quant à la réussite de sa mission.

« J’ai déjà écouté Kofi Annan, qui est un ami avec lequel j’étais déjà en contact quand il s’occupait de cette question-là. […] Jamais on ne commence une mission dans une situation où l’on sait que l’on va réussir, » a-t-il déclaré.

Premiers pas dans le militantisme

Né le 1er janvier 1934 à El Azizia, en Algérie, Lakhdar Brahimi a étudié le droit et les sciences politiques en France et en Algérie.

Rapidement tenté par le militantisme, il fait partie des fondateurs de l’UGEMA (Union générale des étudiants musulmans algériens). Lors d’une manifestation étudiante, il est repéré par le Front de libération nationale (FLN) et par le Gouvernement provisoire de la République algérienne. Il est alors envoyé en Asie du Sud-est pour représenter le FLN entre 1956 et 1961.

Après l’indépendance, proclamée en 1962 avec les Accords d’Evian, Lakhdar Brahimi revient en Algérie où il est nommé Secrétaire général du ministre des Affaires étrangères.

En 1963 et jusqu’en 1970, ambassadeur en Egypte, il remplit également les fonctions de représentant permanent auprès de la Ligue arabe au Caire.

La diplomatie pour le compte de l’Algérie

Ses fonctions diplomatiques pour le compte de l’Algérie le conduisent en 1971 au Royaume-Uni jusqu’en 1979. Lakhdar Brahimi revient en Algérie en 1982 afin de devenir conseiller diplomatique du Président algérien en Egypte et au Soudan.

Deux ans plus tard, il est nommé sous-secrétaire général de la Ligue arabe jusqu’en 1991. Durant cette période, Lakhdar Brahimi sera envoyé au Liban, en pleine guerre civile. Il est l’un des acteurs des Accords de Taef, en 1989, qui mettront fin à 17 ans de conflit.

De nouveau appelé dans son pays natal, il devient ministre des Affaires étrangères entre 1991 et 1993.

Chargé de régler les plus grands conflits mondiaux

Une nouvelle vie s’ouvre alors pour Lakhdar Brahimi. En 1993, il devient représentant spécial pour l’ONU qui le charge de nombreuses missions. Il intervient tout d’abord dans l’Afrique du Sud de la fin de l’Apartheid. Sa mission s’achèvera à l’élection de Nelson Mandela en 1994.

Cette même année, il sera envoyé en Haïti et dirigera également de nombreuses missions en Afrique. Il interviendra au Nigéria, au Cameroun, au Burundi et au Soudan.

Pour le compte de l’ONU, Lakhdar Brahimi est ensuite envoyé en Afghanistan en tant que négociateur. Il représentera les Nations Unies dans le pays entre 1997 et 1999 puis entre 2001 et 2004. Il sera également envoyé dans l’Irak de l’invasion américaine en 2003.

En 2000, il est chargé de la rédaction d’un rapport sur les opérations de paix de l’ONU. Présenté à l’occasion du Millénaire des Nations Unies en septembre de la même année, il y présente les limites politiques, administratives et financières des actions de gestion de crise de l’ONU et propose de nouveaux modes d’actions pour affronter les enjeux du nouveau millénaire.

Le dernier espoir de la Syrie ?

Cinq ans plus tard, Lakhdar Brahimi décide de quitter l’ONU. Ce sera pourtant une retraite de courte durée pour ce grand spécialiste des Nations Unies puisqu’en 2007, le secrétaire général Ban Ki-moon l’appelle au secours afin de mener une enquête spéciale sur les attentats du 11 décembre 2007 qui ont fait 10 morts parmi les membres du personnel des bureaux de l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés et du Programme des Nations Unies pour le Développement.

Le travail de Lakhdar Brahimi a été récompensé par la Fondation Chirac. Le 5 novembre 2010, il reçoit le Prix spécial du jury de la Fondation pour la prévention des conflits.

De nouveau appelé au secours, l’ONU mise aujourd’hui, comme à de nombreuses reprises dans sa carrière, tout sur ce marathonien de la diplomatie qui recueille déjà la sympathie et la confiance de nombreuses puissances étrangères et impliquées dans le conflit syrien. Sur le terrain de la crise, le ministre syrien des Affaires étrangères a déjà fait savoir qu’il attendait le délégué de l’ONU avec impatience. Les rebelles syriens montrent, pour leur part, plus de réticences devant l’arrivée du nouveau médiateur international.

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