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Comment le conflit israélo-palestinien a interféré dans la crise syrienne

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L’opération « Pilier de défense » lancée par Israël contre la bande de Gaza n’aura duré qu’une semaine. Une semaine durant laquelle le conflit syrien, habituellement suivi de très près par les médias internationaux, a été relégué au second plan de l’actualité.

Pas de tournant, mais certainement des incidences régionales

Pourtant, sur place, les offensives de l’armée, comme celles des rebelles, se sont poursuivies en Syrie. Mais derrière ces avancées militaires, c’est la configuration régionale qui, transformée par ce regain de tension israélo-palestinien, a eu des incidences sur le conflit syrien.

Pour Yves Gonzalez, chercheur spécialiste du monde arabe, si la « mini guerre » d’Israël contre la bande de Gaza ne représente pas un tournant dans la configuration du conflit syrien, elle a certainement eu quelques incidences sur le déroulement du conflit.

La question palestinienne n’est pas négligeable en Syrie, et qu’il s’agisse de l’opposition ou du clan loyaliste, personne n’est resté insensible aux actions menées contre la bande de Gaza pendant ces quelques jours.

Les Syriens unanimement derrière les Palestiniens

Malgré cette cause commune à tous les Syriens, certains membres de l’opposition ont pourtant tenté de profiter de cette crise israélo-palestinienne pour s’offrir un avantage médiatique sur Bachar al-Assad.

« L’opposition a tenté de développer une campagne sur le thème : Israël/Bachar al-Assad : même combat », indique Yves Gonzalez.

Mais si la tentative de l’opposition visait à soulever les foules contre le régime en place, cela devait inévitablement se solder en échec.

« L’opposition syrienne a essayé de tirer l’affaire vers elle mais sur place, on a constaté un mouvement de solidarité pour Gaza et ce mouvement de solidarité pour Gaza a traversé les lignes de front. »

La Palestine : une histoire sacrée

La question palestinienne est depuis longtemps sacrée en Syrie et « la libération de la Palestine a toujours été le fonds de commerce du nationalisme arabe. Ni l’opposition ni le régime ne peuvent se mettre en porte à faux sur ce discours-là. »

L’opposition a ici signé une mauvaise campagne de communication qui, si elle pourrait fonctionner dans certains milieux, n’a pas pris racine en Syrie. « Un slogan comme ça ne fonctionne pas car il n’est pas né de la sensibilité locale. C’est un slogan à l’occidental », explique Yves Gonzalez.

Dans ce contexte, c’est une fracture de plus qui s’est créée sur le territoire syrien durant ces derniers jours.

« L’opposition a mal manœuvré. Ce slogan a fonctionné à rebours de ce qui était imaginé », indique-t-il encore.

Complexité de l’opposition syrienne

L’opération Pilier de défense menée par Israël, alors qu’elle se déroulait à quelques centaines de kilomètres du front syrien, a révélé au grand jour une certaine complexité des prises de position syrienne.

« Cette semaine a montré que les clivages syriens sont très compliqués. C’est vraiment une des particularités de la question syrienne », explique Yves Gonzalez.

« Depuis le début du conflit, il y a des camps qui se sont constitués en Syrie. Globalement, deux camps, les pro-régimes et les anti-régimes. Mais même au sein de ces deux camps, il y a des soutiens qui sont très différents. Les lignes de confrontations idéologiques, les appartenances partisanes se sont révélées encore plus complexes qu’elles ne l’étaient. »

Un Hamas fort, nouveau pion sur l’échiquier du Proche-Orient

Finalement, c’est sur le terrain régional que la configuration du conflit syrien a également été transformée.

« La situation va encore se compliquer », explique Yves Gonzalez. « Le Hamas sort renforcé de cette opération. »

L’organisation islamique à la tête de la bande de Gaza a une histoire particulière avec la Syrie. Le Hamas a été hébergé pendant de nombreuses années par la Syrie avant de quitter le territoire il y a quelques mois.

« Le Hamas a quitté la Syrie de façon éclatante avec le soutien des Qatari. On peut estimer que la « victoire » du Hamas à Gaza est également et indirectement une réussite pour la diplomatie qatari. »

Ainsi, par cette « victoire » du Hamas, un nouveau rééquilibrage des forces régionales est effectué.

« Si ce n’est pas un renversement dramatique de la situation, les Syriens ont aujourd’hui un problème de plus », estime Yves Gonzalez. Et ce problème se traduit par un renversement de l’équilibre acquis.

Si, auparavant, le soutien affiché des Qatari au Hamas n’était pas du goût du monde arabe, tant leur image tend à se dégrader dans la région, leur « victoire » face à Israël en fait une force de plus dans la balance contre la Syrie.

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