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Syrie: un Frère musulman à la tête d’une opposition désunie

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Le conflit syrien est entré dans sa deuxième année. Il aura fallu deux ans à la rébellion syrienne pour se constituer en opposition. Deux années difficiles pour obtenir d’une force d’opposition dispersée l’incarnation d’un avenir probable pour la Syrie qui se dessine.

Un Premier ministre pour l’opposition syrienne

C’est ainsi que la Coalition nationale de l’opposition syrienne, réunie à Istanbul lundi 18 et mardi 19 mars a salué l’élection de son nouveau Premier ministre, qui marque les prémices de la formation d’un gouvernement de transition, gouvernement que la communauté internationale appelle de ses vœux depuis de nombreux mois, après avoir reconnu, parfois à la va-vite, la formation de cette coalition à l’avenir incertain.

Ghassan Hitto a été élu par 35 voix contre 49, dépassant ainsi ses 11 adversaires, parmi les 73 membres de la Coalition nationale de l’opposition syrienne. Elu à la majorité des votants, Ghassan Hitto n’a donc pas été élu à la majorité dans la mesure où, en tout, 38 personnes se sont abstenues ou ont voté pour un autre candidat.

Ces mêmes membres, qui auront mis deux ans à s’unir autour du même projet, n’auront passé que 14 heures à se décider autour de la personnalité de Ghassan Hitto. Les avis semblent unanimes au sein de l’opposition qui se réclame représentative de la totalité de la population syrienne opposée au régime de Bachar al-Assad.

Opposant de l’extérieur

Pourtant, si Ghassan Hitto s’est arrogé une quasi-unanimité au sein de son mouvement, il devra encore réunir l’assentiment de la Syrie.

Depuis le début du conflit syrien, l’opposition syrienne a toujours été partagée entre divers intérêts particuliers. Les Syriens de l’intérieur d’une part, les Syriens de l’extérieur d’autre part. Les Syriens sunnites d’un côté, les Syriens chiites et chrétiens de l’autre. Les opposants de l’ombre d’un côté, les Syriens partis les armes à la main de l’autre.

Une opposition si divisée qu’il a fallu de nombreuses tentatives pour parvenir à une formation aujourd’hui actée. Une opposition si divisée que lors de cette réunion, une vingtaine de membres ont encore refusé de se prêter au vote et ont préféré quitter l’assemblée, sans cacher leur ressentiment.

Un mobilisé de la dernière heure

Les démons de la Syrie rôdent toujours et l’élection de Ghassan Hitto pourrait bien les réveiller. Ghassan Hitto représente ce que de nombreux Syriens exècrent. Cet ancien cadre supérieur dans une entreprise de télécommunications de 49 ans est né à Damas mais a vécu quasiment la moitié de sa vie au Texas, avant de rejoindre, en novembre dernier, la coalition.

Mobilisé de la dernière heure, il n’a pas le profil de celui qui a combattu le régime syrien depuis toujours. En tant qu’expatrié, il n’a pas non plus le profil de celui qui a souffert de la guerre.

Au contraire, Ghassan Hitto semble plutôt regarder le conflit depuis le confort de l’étranger. Un statut qui pourrait bien mettre sa légitimité à mal s’il venait à se voir confier de réelles responsabilités, en cas de chute du pouvoir en place.

Un islamiste à la tête des Frères musulmans

Pour parvenir à asseoir son nouveau pouvoir, Ghassan Hitto se prêtera, dans les jours qui viennent au jeu de la diplomatie de terrain. Le nouveau Premier ministre doit se rendre à la rencontre des différents chefs des rébellions qui combattent le régime.

Ghassan Hitto peut déjà se vanter d’avoir obtenu le soutien de l’Armée syrienne libre (ASL). « Nous soutiendrons ce gouvernement et travaillerons sous son égide, » a ainsi déclaré Selim Idriss, le chef d’état-major de l’ASL, qui s’est rendu directement à Istanbul pour prêter allégeance au nouvel élu.

Le temps fera sans doute le reste pour cet islamiste convaincu, issu de la confrérie des Frères musulmans.

Désormais choisi comme Premier ministre, Ghassan Hitto aura la charge de former un gouvernement de transition, dont les noms devraient être annoncés dans les jours qui viennent. Ce gouvernement transitoire devra ensuite prendre la charge des territoires qui ont été conquis par les rebelles syriens au nord et à l’est de la Syrie.

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