Site icon La Revue Internationale

Bachar al-Assad a-t-il encore une chance en Syrie?

bachar-al-assad-sammy-aw.jpgbachar-al-assad-sammy-aw.jpg

[image:1,l]

En deux ans de conflit, la fin du régime de Bachar al-Assad, les tournants dans le conflit et les cessez-le-feu ont maintes fois été prédits. Après 94 000 morts, selon les chiffres de l’ONU, force est de constater que le régime syrien est toujours en place ; il semblerait même qu’il reprenne la main sur les rebelles à l’ouest du pays.

La communauté internationale s’impatiente

Sur le terrain, mais pas seulement. A Istanbul, l’ambiance des négociations qui réunissent les membres de l’opposition syrienne, s’annonçait tendue. Plusieurs objectifs doivent être atteints à l’issue de ces trois jours de réunion et ces derniers annoncent de houleuses discussions. Priorité numéro une : définir la présence, ou non, de l’opposition syrienne à la conférence internationale qui devrait se tenir au mois de juin à Genève.

L’opposition hésite. Il faut dire que du côté du club des principaux adversaires à Bachar al-Assad, une résolution politique du conflit ne doit pas se faire à tout prix et celle-ci n’est pas prête à accepter n’importe quel sacrifice.

Et parmi ces sacrifices, il lui faudrait commencer par ouvrir des négociations avec le régime, ce à quoi elle ne peut se résoudre. Deuxième point à régler : le sort de Bachar al-Assad. Impossible une nouvelle fois d’imaginer une solution politique au conflit syrien sans la chute de l’indestructible président.

Bachar al-Assad fera-t-il partie du plan de sortie de crise ?

Or, la veille, à Amman, les Etats-Unis se sont montrés plus qu’évasifs sur le sujet. Devant ses homologues, le secrétaire d’Etat américain John Kerry a appelé le président syrien à « s’engager en faveur de la paix ». « S’engager pour la paix » et rien de plus. Restant prudents, les Etats-Unis n’ont pas appelé le président syrien à la démission.

A quelques semaines de cette hypothétique conférence internationale qui devrait très théoriquement sceller le sort de la Syrie, les Etats-Unis et la Russie semblent d’ailleurs sur la même longueur d’onde. Une transition en Syrie ne pourra sans doute pas se faire sans le clan Assad, il fallait sans doute s’y résoudre.

Si résolution politique du conflit il y a, Bachar al-Assad semble disposé à faire partie du programme.

Chronique d’une opposition désunie

A cette frilosité de la communauté internationale, il faut ajouter la fragilité. Cette Coalition nationale des forces de l’opposition syrienne a maintenant prouvé à de nombreuses reprises que ses forces étaient désunies et ses objectifs divergents.

Depuis la démission du président Ahmed Moaz al-Khatib, les membres de la coalition ne parviennent pas à redonner une forme à leur mouvement qui devait pourtant, selon les recommandations persistantes et impatientes de la communauté internationale, permettre la formation d’un gouvernement de transition, pièce maitresse d’un processus de transition politique.

Si tout se passe bien à Istanbul, ce gouvernement pourrait d’ailleurs voir le jour et serait à même, dans les jours qui viennent, d’administrer les territoires occupés par l’opposition. L’affaire n’est pourtant pas si simple. Présenté par le Premier ministre Ghassan Hitto, ce cabinet qui devrait être composé de onze ministres pourrait être victime de la défiance des membres de la coalition envers un Premier ministre qui ne fait pas l’unanimité et qui pourrait se voir refuser, par principe, un gouvernement, même légitime.

La communauté internationale est prudente, et pour cause, cela fait maintenant deux ans que les différentes branches de l’opposition ne parviennent pas à trouver un quelconque compromis. Les discussions stériles se succèdent les unes aux autres et en attendant, cette désunion profite largement au régime syrien qui bénéficie de cette longue période de latence pour reprendre du terrain.

Sur le terrain, l’armée d’Assad prend l’avantage

Avec l’aide du Hezbollah libanais, les forces de Bachar al-Assad semblent déterminées à reprendre la ville de Al Qusayr, une localité proche de Homs et située à quelques kilomètres de la frontière libanaise.

L’assaut est d’envergure et l’opposition définitivement en position de faiblesse sur le terrain. Une victoire des forces nationales donnerait un fort avantage au régime tant cette ville est stratégique et ce n’est sans doute pas la déclaration de George Sabra, président par intérim de la coalition, appelant toutes les forces syriennes à s’unir autour des combattants de Al Qusayr qui changera l’équilibre des forces en présence.

Al Qusayr est un point de passage vital pour les rebelles en raison des armes qui circulent en provenance du Liban. Pour la même raison, la prise de cette ville est une priorité absolue pour le régime.

« Rien n’est perdu »

« Démissionner, ce serait fuir », déclarait le président syrien dans un entretien accordé samedi 18 mai à des médias argentins, affirmant qu’il comptait bien se présenter à sa propre succession lors de l’élection présidentielle de 2014.

Depuis deux ans de conflit, Bachar al-Assad affiche une détermination sans faille. Fort de ces soutiens, peu nombreux mais puissants, il ne peut que poursuivre son combat jusqu’au-boutiste car renoncer serait signer son arrêt de mort.

Dans un billet de blog publié dans Le Monde, le 29 avril dernier, l’ancienne haut fonctionnaire Isabelle Hausser imaginait une lettre que Bachar al-Assad écrirait à son père et prédécesseur défunt. Dans cette lettre imaginaire, le président syrien dresse un tableau ironique de deux ans de conflit et regarde aujourd’hui la Syrie dévastée avec un regard de conquérant.

« Tout n’est pas réglé, loin s’en faut », écrit-il alors à son père, Hafez al-Assad. « Mais je tiens toujours Damas et les rebelles ne disposent pas d’autant de matériel que l’armée du régime. »

« Rien n’est perdu », assure-t-il alors. « Fidèle à ton enseignement, je crois qu’il me suffit d’attendre que l’ennemi s’épuise. Au pire, nous nous replierons sur notre montagne et, d’une manière ou d’une autre, nous continuerons à nous battre ».

Quitter la version mobile