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Une ONG dénonce le harcèlement de Syriennes réfugiées au Liban

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Selon les derniers chiffres enregistrés au 20 novembre par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), plus de 824 000 Syriens sont entrés sur le territoire libanais depuis le début du conflit en Syrie.

Ceux-ci pourraient bientôt représenter un quart de la population libanaise. Un chiffre qui risque de s’alourdir, puisqu’hommes, femmes et enfants traversent encore quotidiennement la frontière, fuyant les combats.

Mais l’arrivée de ces milliers de Syriens dans le pays voisin ne signe pas forcément la fin de leur calvaire. Dans un communiqué publié mercredi 27 novembre, l’ONG Human Rights Watch, qui lutte pour la défense des droits fondamentaux, dénonce le harcèlement dont certaines femmes syriennes, réfugiées au Liban, sont victimes.

Abus sexuels

L’ONG a recueilli, entre août et septembre 2013, le témoignage de douze femmes ayant réussi à échapper à la mort et à la destruction en Syrie.

Celles-ci ont expliqué avoir fait l’objet, au Liban, d’attouchements, de harcèlement et de pressions en vue d’obtenir des relations sexuelles, parfois à plusieurs reprises, de la part de leurs employeurs, des propriétaires des habitations où elles logent et même de certains agents d’associations caritatives religieuses chargés de les aider.

Ces femmes « devraient trouver au Liban un refuge sûr, au lieu d’être confrontée à des abus sexuels », déplore la directrice de la division Droits des femmes à Human Rights Watch, Liesl Gerntholtz. « Le gouvernement libanais et les organismes d’aide devraient ouvrir les yeux sur le harcèlement sexuel et l’exploitation de ces réfugiées vulnérables, et prendre toutes les mesures requises pour y mettre fin ».

« De l’argent contre ta fille »

Human Rights Watch rapporte notamment le cas d’Hala, âgée de 53 ans et originaire de Damas, dont le mari serait détenu par le gouvernement syrien. Elle a expliqué avoir été victime de harcèlement sexuel ou de tentative d’exploitation dans plusieurs foyers où elle faisait le ménage, en banlieue de Beyrouth, pour subvenir à ses besoins et à ceux de ses quatre enfants.

Ses employeurs lui ont notamment dit : « Nous allons te donner plus d’argent en échange d’un acte sexuel ou si tu nous donnes ta fille » de 16 ans, en mariage.

Hala a également expliqué qu’elle n’avait pas signalé ces incidents aux autorités libanaises, pensant qu’elles ne l’aideraient pas. D’autres femmes n’osent pas se plaindre à la police, de peur que celle-ci ne découvre qu’elles n’ont pas de permis de séjour valable.

Augmentation des violences sexuelles et des mariages précoces

« Femmes et filles représentent plus de la moitié des réfugiés », écrit sur Mediapart Martine Storti, ancienne journaliste et présidente de l’association Féminisme et géopolitique.

« Elles sont pour la plupart au premier rang pour tout ce qui relève de la survie quotidienne, c’est-à-dire la nourriture, les soins aux nombreux enfants, le ménage, l’organisation de la vie quotidienne, ce qui n’est pas forcément aisé en temps normal mais encore moins dans des conditions matérielles difficiles », rappelle-t-elle.

« L’augmentation des violences sexuelles au sein des familles est relevée par plusieurs enquêtes, ainsi que les violences sexuelles dans les camps informels, les abris de fortune, les hébergements précaires », écrit encore Martine Storti.

« Les veuves, les femmes seules craignent le harcèlement, l’agression, si bien que certaines dissimulent la mort de leur mari ou font semblant de recevoir des appels téléphoniques d’un époux pour qu’on les laisse tranquilles. On constate aussi l’augmentation des mariages précoces, souvent avec de bonnes intentions, pour sauver les jeunes filles de la précarité et de la pauvreté ».

Appel à l’aide internationale

« L’apport de tous les fonds promis et l’augmentation de l’aide des gouvernements donateurs sont nécessaires de toute urgence », indique Human Rights Watch dans son communiqué, qui rappelle que selon le Haut-Commissariat pour les réfugiés, l’appel de 1,2 milliard de dollars américains pour les réfugiés au Liban était financé, fin octobre, à seulement 51%.

« Les gouvernements de pays tels que le Brésil, la Chine, la Russie, le Qatar, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, dont les contributions à l’appel de l’ONU pour l’aide aux réfugiés ont été minimes, devraient augmenter le financement pour répondre aux besoins fondamentaux des réfugiés » exhorte encore l’ONG.

« La communauté internationale devrait fournir les ressources nécessaires pour éviter aux femmes réfugiées d’avoir à choisir entre subir la violence sexuelle et subvenir aux besoins de leurs familles », a conclu Liesl Gerntholtz. « Le gouvernement libanais et les agences humanitaires doivent mettre en place des systèmes qui protègent et aident les femmes réfugiées qui signalent les abus. »

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