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Syrie: des activistes se mobilisent à coups de crayons

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Fin décembre, la ville de Kafr Nabl, située près d’Idlib dans le nord-ouest de la Syrie, a été la cible d’attaques de militants de l’État islamique d’Irak et du Levant (EIIL), groupe islamiste affilié à Al-Qaïda.

Raid contre des médias

Le 30 décembre au soir, les groupes d’activistes de la ville – connue pour être l’un des symboles du soulèvement rebelle contre le régime syrien – ont raconté au journal libanais The Daily Star que des militants de l’EIIL avaient mené des raids contre une station de radio et un centre de médias situé à proximité.

Dix professionnels de l’information ont été détenus pendant deux heures puis relâchés par les terroristes. Ces derniers ont saccagé les locaux, volé ou détruit des ordinateurs, des caméras, des équipements informatiques et des bannières et dessins anti-régime stockés dans le bâtiment.

Malgré l’attaque, un militant interrogé par le Daily Star a affirmé que leur mobilisation contre le régime de Bachar al-Assad continuerait. À coups de crayons. Car depuis le début de la révolution syrienne, la population de Kafr Nabl publie chaque semaine sur Internet et sur les réseaux sociaux un dessin satirique ou une grande pancarte, s’adressant principalement aux dirigeants internationaux mais également aux internautes du monde entier.

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Dessins satiriques et bannières militantes

Ces messages et ces caricatures, qui détournent parfois des célèbres affiches de films comme Aliens ou Le Parrain, sont visibles sur le site « Occupied Kafranbel », désormais rebaptisé « Liberated Kafranbel » depuis que la ville est tombée aux mains des opposants au régime syrien en septembre 2013, trente mois après le début de la guerre civile. Ils sont également publiés sur une page Facebook créée par les activistes.

« Depuis le début de l’insurrection, les habitants de Kafranbel [le nom de la ville a été changé pour être lu plus facilement par les internautes du monde entier] publient des dessins égratignant le régime d’Assad et exprimant leur indignation sur le fait que le monde n’a pas fait plus pour arrêter le massacre en Syrie », écrivent les activistes sur leur site, ajoutant que « ce type de défi et de courage est ce qui va finalement détruire Assad et son régime tyrannique ».

Tarifs Raed, un militant Kafranbel, explique que les habitants de la ville ont choisi d’écrire en anglais plutôt qu’en arabe, pour atteindre un public international. « Il est très important d’envoyer notre message à tout le monde », précise-t-il. « Et l’anglais est la langue publique ».

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La révolution syrienne en 3 minutes

Les activistes ont été particulièrement présents sur les réseaux sociaux au moment de l’attaque chimique qui a frappé la périphérie de Damas en août dernier. Dans les semaines qui ont suivi l’attaque, les rebelles de Kafranbel se sont mobilisés pour favoriser l’intervention des puissances étrangères en Syrie.

Ils ont notamment publié deux vidéos, l’une à destination du Congrès américain, reprenant au début et à la fin de la séquence des messages de Ronald Reagan et de Martin Luther King, et l’autre à destination du monde entier, expliquant la révolution syrienne « en trois minutes ». Celle-ci fustige l’attitude des puissances étrangères, accusées de ne pas avoir réagi assez vite et d’avoir laissé les mains de Bachar al-Assad libres de tuer des milliers de civils syriens.

On y voit deux groupes d’hommes préhistoriques s’affronter, l’un tirant à plusieurs reprises sur l’autre groupe, constitué de manifestants pacifistes. Tout cela sous les yeux de trois personnes indifférentes au combat. L’une d’elle – qui représente les États-Unis – finit par protester au moment où le groupe d’assaillants s’empare d’une bonbonne de produit chimique, avant de reprendre tranquillement sa place de spectateur :

Depuis l’attaque de locaux médiatiques dont ils ont été victimes à Kafr Nabl, les activistes syriens continuent de publier leurs messages et dessins, mais ils apparaissent maintenant cagoulés, le visage caché derrière des foulards, pour éviter des représailles ciblées de l’EIIL.

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