Site icon La Revue Internationale

Turquie: Selahattin Demirtas, l’autre vainqueur de l’élection présidentielle?

demirtas.jpgdemirtas.jpg

[image:1,l]

C’est le sourire aux lèvres que Selahattin Demirtas a accepté son score à l’élection présidentielle, le 10 août dernier : 9 %, soit pratiquement le double des suffrages qu’il avait rassemblés lors des dernières élections locales en Turquie, le 30 mars dernier.

Après avoir mené une campagne intensive, cet avocat de 41 ans, candidat du HDP (Parti démocratique populaire) – force politique pro-kurde -, est aujourd’hui désigné comme « l’autre gagnant du scrutin ».

« Il a bien joué le jeu de l’élection présidentielle : il a porté des projets contrairement à l’autre candidat de l’opposition Ekmeleddin Ihsanoglu », explique à JOL Press Jean Marcou, professeur à Sciences Po Grenoble, chercheur associé à l’Institut Français d’Études Anatoliennes d’Istanbul.

Le candidat des minorités

Celui qui appelait à s’élever contre « les discriminations ethniques, religieuses, sociales et sexuelles », l’affirme : il n’a rien « inventé de nouveau », mais veut seulement « représenter les opprimés ».

L’ancien président de l‘Association des Droits Humains en Turquie (IDH) a d’une certaine manière gagné son pari, à savoir « représenter les catégories négligées ou ignorées en Turquie : les chrétiens, les Arméniens, les homosexuels, et pas uniquement la minorité Kurde », poursuit le professeur Jean Marcou.  

Un nouveau courant dans l’opposition ?

Selahattin Demirtas pourrait donc désormais s’imposer comme la figure de proue d’une nouvelle opposition, qui s’était jusqu’à maintenant articulée autour de vieux partis : les nationalistes du Parti pour le mouvement nationaliste (MHP), les kémalistes (CHP) : « de vieilles familles politiques qui n’arrivent pas à se renouveler et à aborder les problématiques d’aujourd’hui », explique encore Jean Marcou.

Le candidat pourrait dans le même temps résoudre l’un des principaux problèmes auxquels est confronté le système politique turc aujourd’hui : le manque de nouvelles forces politiques qui puissent répondre aux problématiques des Turcs. 

« Selahattin Demirtas s’est imposé comme un candidat nouveau, en renouvelant le discours kurde, traditionnellement nationaliste ». Reste à savoir désormais comment il se servira de cette percée politique dans les semaines et mois à venir, et quelle sera l’issue des élections législatives de 2015 : « s’il arrive ou non à poursuivre l’élargissement de sa base d’influence ».

————————

Jean Marcou est professeur à Sciences Po Grenoble, chercheur associé à l’Institut Français d’Études Anatoliennes d’Istanbul

Quitter la version mobile