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Pour mener à bien ses réformes, l’Arabie saoudite s’appuie sur sa jeunesse

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C’est un fait. L’Arabie saoudite doit changer de modèle économique pour résister à la baisse de la manne pétrolière. Et pour cela, le pays peut compter sur sa jeunesse, que le prince héritier Mohammed Ben Salmane place justement au cœur de sa politique de diversification. Les nombreuses fondations philanthropiques du pays, comme la fondation MBI Al Jaber, l’International Youth Foundation ou encore la fondation du roi Faisal, qui sont spécialisées dans l’accès à l’éducation des jeunes saoudiens jouent — de facto — un rôle non négligeable dans la réussite des projets du jeune prince.

« Aider les talents de la prochaine génération issue du monde arabe à gagner leur liberté et l’opportunité de bâtir leur futur » : voici, en quelques mots, le crédo de la Fondation MBI Al Jaber, l’organisation philanthropique créée par le prince saoudien Mohammed Bin Issa Al Jaber, qui œuvre en faveur de l’éducation des jeunes du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord. Cette profession de foi pourrait également être celle du jeune prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammed Ben Salmane, qui a fait de la modernisation de son pays le grand défi de son futur règne.

Car l’Arabie saoudite n’a plus le choix. Confronté à la stagnation des prix du pétrole et à la fin prochaine de ses réserves, le royaume, qui tire 90 % de ses recettes de l’exportation d’hydrocarbures, doit impérativement sortir de son hyperdépendance à l’or noir. D’un modèle principalement basé sur la rente, exploitée par des entreprises publiques, l’Arabie de celui que l’on surnomme « MBS » doit passer à un modèle plus diversifié, mais aussi plus en phase avec les attentes de sa population — composée à 70 % de jeunes de moins de 30 ans.

Pour accompagner cette nécessaire transformation, MBS a concocté un ambitieux plan, intitulé « Vision 2030 ». Présenté en avril dernier, ce projet vise notamment le développement des énergies renouvelables, le lancement d’une véritable industrie des loisirs et du tourisme et la baisse de 70 % à 38 % de la part des emplois assurés par le secteur public. « Nous avons un Etat drogué au pétrole, a reconnu le jeune prince, et c’est dangereux ».

Lui-même âgé de 32 ans, le fils du roi Salmane a placé la jeunesse saoudienne au cœur de son projet. Il la sait ambitieuse, forte de ses compétences souvent acquises dans les meilleures universités anglo-saxonnes, et demandeuse de changements dans une société encore largement régie par les tabous décrétés par les religieux ultraconservateurs. Problème, le marché du travail saoudien ne suit pas : alors que 6 millions de jeunes de moins de 15 ans arriveront d’ici à 2030 sur le marché du travail, MBS a l’obligation de leur proposer des emplois à la mesure de leurs qualifications. Finis les emplois de chauffeur dans un ministère, même sur-subventionnés, place aux employeurs privés — et étrangers — et à l’innovation.

Séduire les investisseurs étrangers sera, en effet, l’une des clés de l’indispensable diversification de l’économie saoudienne. MBS, qui a annoncé la mise en vente de 5 % de la compagnie pétrolière nationale Aramco afin de financer la création d’un gigantesque fonds d’investissement destiné à sortir le pays de sa dépendance aux hydrocarbures, veut que « les investissements (deviennent) la première source de revenus du gouvernement saoudien ». Mais cela ne suffira pas.

Le rôle indispensable des fondations

Dans son entreprise de modernisation, MBS peut s’appuyer sur les nombreuses fondations philanthropiques saoudiennes, qui ont fait de l’accès à l’éducation leur raison d’être. A l’image de la fondation MBI Al Jaber, dont on a parlé, et qui depuis les années 1990 a permis à des centaines d’étudiants prometteurs, originaires du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, de réaliser leurs études au sein des établissements les plus prestigieux au monde.

MBS peut également compter sur la fondation du roi Faisal (King Faisal Foundation, KFF), une organisation née dans les années 1970, qui entre sa création et 2015 avait dépensé plus de 1,9 milliard de riyals saoudiens pour supporter un grand nombre de projets ayant trait à l’éducation. Citons également l’International Youth Foundation (IYF), qui fait de l’employabilité des jeunes Saoudiens son mantra. En ciblant tant les besoins des entreprises locales que ceux des étudiants, IYF a, par exemple, participé à la formation des jeunes qui seront bientôt recrutés par des entreprises comme Hilton International. En association avec la célèbre banque JPMorgan Chase, IYF a également contribué à former de jeunes saoudiennes aux métiers de la distribution et de la santé.

Education for Employment (EFE), une fondation très présente dans le monde arabe, a quant à elle ciblé les femmes saoudiennes peu formées afin de leur proposer des cursus directement liés aux besoins du marché. L’organisation se targue d’avoir placé quelque 270 jeunes sur le marché du travail et, dans un pays où les femmes sont encore largement absentes des sphères de décision économiques, de compter 46 % de femmes parmi ses diplômés.

La jeunesse est « l’or » de l’Arabie du futur. Une jeunesse ultra-connectée — les Saoudiens sont parmi les plus gros consommateurs de vidéos YouTube au monde —, ouverte sur le monde, avide de reconnaissance et de changement. Entre les changements économiques et sociétaux promis au plus haut niveau et les opportunités offertes par les fondations, il se pourrait bien qu’elle prenne, enfin, son destin et celui de l’Arabie saoudite en main. 

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