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Ottawa défie Riyad

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Le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, a fait preuve de courage en accordant l’asile politique à la jeune Saoudienne Rahaf Mohammed al-Qunun. Celle-ci a été accueillie à l’aéroport de Toronto, le 12 janvier, par la ministre canadienne des Affaires étrangères, Chrystia Freeland.

La jeune femme de 18 ans s’était barricadée dans une chambre d’hôtel, à Bangkok, début janvier, pour protester contre la tutelle imposée aux femmes, même adultes, en Arabie saoudite. Elle y fit une demande d’asile, jugée recevable par le haut-commissariat des Nations unies aux réfugiés (UNHCR), d’abord rejetée par l’Australie, puis finalement acceptée par le Canada.

Des rapports déjà tendus

Ce n’est pas la première fois que le Canada et l’Arabie saoudite s’opposent sur la question des droits de l’homme. En août 2018, Chrystia Freeland s’était publiquement inquiétée de l’arrestation de la féministe saoudienne Samar Badawi, et était revenue sur le sort du frère de cette dernière, Raif Badawi. Ce blogueur, inculpé en 2012 pour « insulte à l’Islam », avait été condamné à dix ans de prison, et à mille coups de fouet (châtiment qu’il continue à recevoir régulièrement).

L’Arabie saoudite avait alors dénoncé une « ingérence inacceptable dans ses affaires intérieures », en qualifiant les propos de Chrystia Freeland de « diktat ». L’ambassadeur canadien avait immédiatement été expulsé de Riyad, et d’importants investissements saoudiens avaient été gelés au Canada.

Liés par les armes

Même si Justin Trudeau assume son franc-parler au sujet des droits de l’homme, cela ne l’empêche pas de poursuivre ses échanges avec l’Arabie en matière d’armement. D’un côté, le Premier ministre rappelle son engagement à obtenir la libération de Raif Badawi, mais de l’autre, il continue d’honorer le contrat de près de dix milliards d’euros concernant la livraison de blindés légers à l’Arabie saoudite.

Il s’agit du plus important contrat de l’histoire de l’industrie de défense canadienne, dont l’Arabie saoudite ne respecte déjà plus les obligations, avec plus d’un milliard d’euros d’arriérés de paiement. Bien sûr, ces retards sont monnaie courante dans les échanges internationaux … Ou peut-être faut-il voir ici la conséquence des choix, certes courageux, mais dangereux, du Premier ministre canadien.

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