Site icon La Revue Internationale

Durcissement du ton entre Ankara et Pékin

Chine, Turquie, OuighoursChine, Turquie, Ouighours

Muette depuis des années sur les persécutions subies par les Ouïgours en Chine, la Turquie vient de sortir de sa torpeur, samedi 9 février. Ankara a demandé la fermeture des camps d’internement de la province du Xinjiang, où des centaines de milliers de représentants de cette minorité, musulmane et turcophone, sont détenus.

De la part d’Ankara, ce n’est pourtant pas une première. En 2009, le président Erdogan était allé jusqu’à accuser la Chine de « génocide » envers la minorité ouïgoure. Toutefois, ses relations tendues avec l’occident ont ensuite poussé le président turc à se rapprocher de l’Est, et notamment de la Chine. Dans le souci de préserver son nouvel allier, Erdogan a donc relégué la situation ouïgoure au second plan, mais voilà qu’aujourd’hui il la remet à l’ordre du jour. Pourquoi ?

Nécessité électorale

Pour le parti du président turc, le Parti de la justice et du développement (AKP), le problème ouïgour est devenu une priorité pour remporter les élections municipales du 31 mars prochain. En effet, alors que le pouvoir d’achat des ménages ne cesse de s’amoindrir, l’AKP a plus que jamais besoin de ses alliés ultranationalistes, or, ces derniers sont particulièrement attachés à la question ouïgoure.

Voilà donc qui explique l’intervention turque. Toutefois il faut rappeler à quel point celle-ci est limitée. Il ne s’agit que d’un communiqué diplomatique, émanant du porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Hami Aksoy. Personne d’autre n’est mentionné, personne d’autre ne sait prononcé, et pour de nombreux experts, les choses en resteront là. La Turquie a trop besoin des investissements chinois.

Réaction chinoise

L’ambassadeur chinois en Turquie a jugé les déclarations du ministère des Affaires étrangères « totalement inacceptable », et s’est ensuite fait plus menaçant : « Nous espérons que la partie turque aura une compréhension correcte des efforts faits par la Chine pour, légalement, déployer des mesures destinées à combattre de manière effective le terrorisme et l’extrémisme, qu’elle retirera ses fausses accusations et prendra des mesures pour éliminer leurs effets négatifs. »

Mais ce revirement turc est une épine dans le pied de la Chine, qui fait face à de fortes pressions occidentales. Samedi, encore, elle bénéficiait de l’appui de tous ses partenaires musulmans, qui corroboraient sa version selon laquelle il s’agirait de  «  centres de formation contre la radicalisation islamiste », mais aujourd’hui la Turquie fait dissension. Cette attitude pourrait donc constituer un dangereux précédent, qui n’est pas sans inquiéter Pékin.  

 

Quitter la version mobile