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Trump reconnaît la souveraineté d’Israël sur le plateau du Golan

A l’aune d’une visite de son premier diplomate, Mike Pompeo, à Jérusalem, Donald Trump a décidé de mettre la communauté internationale sens dessus-dessous avec un tweet explosif – visiblement le nouveau canal de prédilection de la diplomatie américaine. « Après 52 ans, il est temps pour les Etats-Unis de reconnaître pleinement la souveraineté d’Israël sur le plateau du Golan, qui a une importance stratégique pour l’Etat d’Israël et la stabilité régionale » a-t-il écrit.

Cette région appartenant à la Syrie depuis 1923 est de fait occupé par des troupes israéliennes depuis la guerre des six jours (1967). Après avoir mis en déroute l’armée syrienne, Tsahal a en effet maintenu une présence militaire sur ce plateau, stratégique pour Israël. Il a par la suite été unilatéralement annexé par Israël au terme des négociations de Camp David, en 1981 – ce qui lui vaut la condamnation du Conseil de sécurité des Nations unies. Aujourd’hui, la région abrite environ 30 000 Israéliens et 22 000 Druzes.

Iconoclaste comme à son habitude, le Président américain met un terme à une position américaine vielle de plus de 50 ans. Il agit également à contre-courant des résolutions 242 et 338 des Nations unies – mais là encore, Trump n’en est pas à sa première action en violation totale du droit international. Sa décision de transférer l’ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem en mai 2018 avait déjà défrayé la chronique pour des raisons similaires.

Un plateau stratégique

La nouvelle n’est toutefois pas une surprise totale. Mi-novembre, Washington s’était pour la première fois opposée à une résolution de l’ONU considérant l’annexion israélienne du Golan « nulle et non avenue ». De plus, dans son rapport annuel sur les droits de l’homme dans le monde, publié le 13 mars dernier, le département d’Etat américain avait cessé de désigner le plateau du Golan comme un territoire « occupé » par Israël, au profit de l’expression « territoire contrôlé ».

De fait, Trump s’était aligné sur la position d’Israël, qui accuse depuis 2017 le Hezbollah libanais de s’implanter à sa porte dans le Golan. D’après le général Gadi Eisenkot, alors chef de l’état-major israélien, ces derniers s’y seraient toutefois installés à l’insu du régime syrien de Bachar al-Assad, profitant du chaos provoqué par la guerre civile syrienne. Rappelons que les deux voisins demeurent en état de guerre depuis le conflit du Kippour de 1973.

Alliés comme adversaires du régime syrien ont condamné ce tweet. La France, l’Union européenne, la Turquie, la Russie, l’Iran, l’Égypte la Syrie, bien entendu, mais aussi la coalition des principaux groupes de l’opposition syrienne en exil, soutenus par Washington, ont ainsi dénoncé l’annonce du président américain. Si cet appel n’a pour l’heure pas de valeur légale (le congrès doit la valider ce qui est loin d’être certain) il s’agit d’une provocation de plus, susceptible de mettre le feu aux poudres dans une région déjà volatile.

Un cadeau pour un ami

A l’approche d’élections législatives israéliennes dont l’issue est incertaine (9 avril), cette annonce est une vraie aubaine pour le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu. Ce dernier est en effet en difficulté dans les sondages après deux scandales – l’un concernant son fils aîné Yair et l’autre des avoirs cachés en relations avec son cousin, le milliardaire américain Nathan Milikowsky. Aussi, l’annonce constitue une ingérence électorale assez peu subtile.

Netanyahu a d’ailleurs salué « « un véritable miracle digne de la fête juive de Pourim célébrée hier ». Une déclaration ironique pour celui qui, jusqu’en 2011, avait conduit des négociations confidentielles avec Damas pour organiser un retrait israélien du plateau du Golan dans le cadre d’un accord de paix entre les deux pays.

Cette annonce vient une nouvelle fois souligner le court-termisme de la politique de Trump – qui ne semble pas voir plus loin que le 9 avril prochain. Le gouvernement syrien a réagi à l’annonce en martelant qu’il récupérait le plateau du Golan par « tous les moyens possibles ». Une chose est sûre maintenant ce que cette promesse en l’air a été faite : il sera très difficile pour un futur gouvernement israélien d’envisager un retrait, même dans le cadre de négociations de paix avec les syriens.

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