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La droite l’emporte lors des législatives grecques

Les législatives anticipées de dimanche 7 juillet ont porté la droite au pouvoir en Grèce. En tête avec 39,8 % des suffrages, le parti « Nouvelle Démocratie » détiendra 158 des 300 sièges du parlement grec, la Vouli. Cette formation pourra donc se passer d’une alliance avec les centristes de Kinal (l’ancien Pasok) pour gouverner le pays. « Une période douloureuse se referme », a réagi Kyriakos Mitsotakis, chef de file conservateur. Ce réformateur, fils de premier ministre, descendant d’une dynastie politique et proche des milieux d’affaires, a promis de « relancer l’économie » grecque, encore très mal en point, et de « laisser la crise derrière nous ».

S’il a la voie libre, la politique de Mitsotakis devrait toutefois être modérée. « [Il] a tout intérêt à ne pas mener une politique trop à droite », estime Manos Papazoglou, professeur de sciences politiques à l’université du Péloponnèse. « De nombreux Grecs ont voté pour lui dans le but de punir Alexis Tsipras, mais ils restent des électeurs du centre. » « Dans les rangs de Nouvelle Démocratie, certaines personnalités très réactionnaires occupent des postes importants, comme le vice-président du parti, Adonis Giorgiadis, qui est issu de l’extrême droite », rappelle le politologue Seraphim Seferiades. « Mitsotakis ne pourra pas ne pas leur donner une place dans le prochain gouvernement. »

Une déconvenue pour Syriza

L’ancien parti au pouvoir, Syriza, n’a pour sa part obtenu 31,5 % des voix. Aussi, il ne conservera que 86 des 144 sièges qu’il avait. Le leader de gauche, Alexis Tsipras, avait tenté un coup de poker en convoquant lui-même ces élections anticipées après un score décevant aux élections européennes – son mandat s’achevant en principe en octobre. Malgré une campagne très volontaire, ce dernier n’aura su suffisamment redresser la barre pour récupérer la première position. Il devait faire face à la déception des grecs sur ses politiques de réduction de la dette nationale, tout en subissant une brutale cure d’austérité imposée par ses créanciers, l’Union européenne et le Fonds monétaire international.

Son acceptation de la rigueur budgétaire dictée par Berlin – d’aucuns parlent de soumission, par exemple l’ex -ministre des Finances Yanis Varoufakis – lui a valu l’inimitié de nombreux grecs, notamment au sein de son propre parti. « Nous avons appliqué une politique des finances impopulaire et pro-bancaire, une recette qui conduit à l’usure », a confié Nikos Xydakis, ex-député du Syriza et ancien ministre de la Culture. D’après lui, la formation de gauche radicale a fait « trop de promesses » avant de s’aligner sur les propositions de Bruxelles. « Nous avons cultivé ces promesses et les électeurs les ont aussi cultivées de leur côté et au lieu d’une confrontation, Syriza est entré en collision ».

Vers un retour au bipartisanisme

Si Syriza recule, après une montée en puissance stellaire sur fond de crise de la dette et de ressenti croissant à l’égard des institutions européennes, ce vote l’installe tout de même comme la principale force d’opposition du pays. Ce faisant, il remplace le Pasok (centre gauche, 8 %) malgré un changement de nom présenté comme un nouveau départ. Plus largement, ce scrutin marque un retour à un système de bipartisme qui a rythmé la vie politique grecque jusqu’à la crise économique de 2007. L’incapacité de Syriza à s’entendre avec la gauche traditionnelle, qu’il tente de remplacer lui a couté la première place.

Autre perdant de ce scrutin : le parti néonazi Aube Dorée ; qui avait profité de la crise pour faire son entrée à la Vouli. Aube Dorée n’aura plus de représentants dans le nouveau Parlement, ayant recueilli 2,9% des voix – juste en-dessous du seuil des 3% prévu pour avoir un représentant. Ce score est très décevant pour une formation qui avait un temps plafonné à 21 sièges, avec près de 7% des voix. Il consacre le recul amorcé lors des récentes élections européennes où elle n’avait recueilli que 4,9% des voix. Mais cela na consacre pas pour autant la fin de l’extrême droite en Grèce. Aube Dorée aura ainsi pati de l’essor de la formation ultraorthodoxe pro-russe « la Solution grecque » qui, avec 3,7% des voix, fait pour la première fois son entrée au Parlement.

 « Les Grecs ont toujours exercé un vote punitif envers le parti au pouvoir », analyse la professeure à l’université Pantion d’Athènes Alexandra Koronaiou. « Mais si on met côte à côte le très fort taux d’abstention probable et ce vote en faveur de l’extrême droite et des néonazis, le scrutin de dimanche révèle un désespoir des électeurs ». Le taux de participation a en effet été historiquement bas (58 %). « Ils ne font plus la différence entre gauche et droite. À leurs yeux, toutes deux appliquent l’austérité, se soumettent aux diktats étrangers. Ils estiment que ce n’est plus la peine de voter, ou alors voter pour ceux qui n’ont jamais été au pouvoir et qui promettent de faire le ménage ».

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