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L’Asie centrale s’éloigne de Moscou

Suite à l’invasion de l’Ukraine initiée le 24 février dernier, les ex-républiques soviétiques d’Asie centrale ont progressivement pris leurs distances avec Moscou, pour le plus grand plaisir des Occidentaux mais surtout de la Chine, aux aguets.

Méfiance à l’égard de Poutine

En tant que pays voisins de la Russie, les pays d’Asie centrale voient évidemment d’un mauvais oeil l’invasion de l’Ukraine, un sort qui pourrait facilement leur être réservé. Les gouvernements des cinq « Stan » sont donc contre cette guerre, et a fortiori contre les annexions forcées. 

Le 17 juin dernier, lors d’une visite à Saint-Pétersbourg, il avait par exemple été demandé au président kazakh Kassym-Jomart Tokaïev s’il était prêt à reconnaître les républiques « séparatistes » de Donetsk et Louhansk. « Si le droit à l’autodétermination est mis en pratique partout dans le monde, alors il y aura plus de 600 pays au lieu des 193 États qui sont actuellement membres des Nations unies. Bien sûr, ce serait le chaos », avait rétorqué l’intéressé. Une manière plutôt élégante de répondre non.

La désapprobation de l’invasion se fait aussi de façon tacite, lorsque l’Ouzbékistan réaffirme soutenir « l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine », ou lorsque le Kazakhstan refuse de s’opposer aux sanctions décrétées contre la Russie.

Les habitants d’Asie centrale partagent d’ailleurs la même rancoeur que les Ukrainiens à l’égard des Russes. « Il y a un ressentiment général envers le chauvinisme, l’impérialisme et le racisme russes que de nombreux migrants d’Asie centrale ont vécu en Russie. Cela s’enracine dans une histoire longue de la colonisation, qui se poursuit aujourd’hui avec la domination politique de Moscou sur la région. De nombreux citoyens souhaitent voir leur pays s’émanciper de l’emprise de Poutine », souligne la sociologue Asel Doolotkeldieva.

Répercussions sur la région

Les turbulences causées par la guerre se sont propagées jusque dans la région d’Asie centrale, où l’activité de l’oléoduc Caspian Pipeline Consortium (CPC) a été suspendue par Moscou au début de l’été pour « violations administratives ». « Il s’agissait surtout pour Moscou de faire sentir aux actionnaires américains de Tengiz, Chevron et ExxonMobil, ce que signifie que de sanctionner la Russie. Il s’agissait aussi sans doute de contribuer à faire monter les cours mondiaux du pétrole », explique un conseiller du président kazakh.

Mais de tels agissements de la part de Moscou sont bien sûr de nature à inquiéter et lasser les « Stan », qui sont de plus en plus tentés de se rapprocher de Pékin et de l’Occident, qu’ils redoutent également. D’un côté la Chine, qui représente le « péril jaune », est vue d’un mauvais oeil, mais le président Xi Jinping a su rassurer lors du sommet annuel de l’Organisation de coopération de Shanghaï, qui se tenait mi-septembre au Kazakhstan et en Ouzbékistan. « Nous continuerons à soutenir fermement le Kazakhstan dans la défense de son indépendance, de sa souveraineté et de son intégrité territoriale », avait-il déclaré.

D’un autre côté l’Occident, qui représente les droits de l’Homme et la démocratie, inquiète ces régimes autoritaires. Mais les Etats-Unis et les Européens ont impressionné par le soutien qu’ils ont apporté à l’Ukraine, et « l’Occident reste un partenaire clé dans ce moment si délicat », assure le conseiller du président kazakh. 

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