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Banques grecques: peut-on encore leur faire confiance ?

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Avoir foi dans le système bancaire

Dans les jours tumultueux qui ont suivi les élections législatives du 6 mai 2012, plus d’un milliard de dollars a été retiré des comptes bancaires grecs, induisant une dangereuse spéculation. Pourtant, beaucoup continuent à faire confiance au système bancaire en y laissant les économies d’une vie. Malgré les risques, Nikos Charakaidis et sa femme Magda Verouli conservent leur 13 000 euros d’économies par principe. « Si tout le monde retire son argent, l’économie s’arrête. »

Une accélération de l’exode des déposants a débuté il y a maintenant deux ans, lorsque la situation est devenue claire aux yeux de tous. Si cette tendance venait encore à s’amplifier, les institutions financières de la Grèce finiraient par s’écrouler et mettraient en péril toute l’Europe. Même si Athènes met en place des mesures assurant que les gens qui placent leur argent en banque puissent le récupérer, ce serait certainement par le biais d’une drachme dévaluée de façon drastique.

La confiance placée dans le système est donc plus surprenante encore que ces retraits massifs. Nikos Charakaidis et sa femme pourraient aisément retirer leurs économies dans la machine située à quelques mètres de leur magasin de location de vidéo, dans la banlieue d’Athènes. « Non, merci » répondent-ils. Pour eux, c’est une question de principe. « Si tout l’argent est retiré de la banque, tout s’effondre ». Depuis que la dette a été révélée, les Grecs aisés ont beaucoup investi dans l’immobilier dans des endroits comme Londres. D’autres ont préféré stocker cet argent chez eux alors que certains utilisent leur épargne pour payer les factures.

Des chiffres bien réels

Si l’on se réfère aux statistiques de la Banque de Grèce, les dépôts des ménages ont diminué de 30% environ, sur la période allant d’octobre 2009 jusqu’à fin mars 2012. Un recul estimé à 90 milliards d’euros. Près d’un milliard d’euros a été retiré des comptes grecs, sur la simple journée suivant l’élection, où les deux parties soutenant le renflouement ont subi un revers considérable.
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En votant contre les mesures d’austérité qui accompagnent les fonds de sauvetage, les Grecs ont relancé un débat dans toute l’Europe pour savoir si le pays doit rester dans la zone euro. Une décision qui pourrait avoir des répercussions sur d’autre pays comme l’Espagne ou l’Italie.

Une nouvelle élection est donc prévue le 17 juin prochain, après l’échec de la formation d’un gouvernement de coalition. L’agence de notation Fitch a mis en garde contre de nouveaux risques, en dévaluant la cote de crédit de la Grèce.

Un flou politique et économique

De récents sondages ont montré que la Coalition de la gauche radicale (Syriza), qui est arrivée à la deuxième place dans l’élection du 6 mai dernier, pourrait passer devant le Parti du Nouveau Centre Droit au prochain vote.

Syryza s’oppose avec véhémence aux conditions de sauvetage proposées à la Grèce par le FMI. Le soutien au Parti de la Nouvelle Démocratie devrait cependant être assez important pour créer une coalition avec les socialistes du Pasok, souligne Reuters.
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Fitch a ajouté que si les vainqueurs de l’élection n’honoraient pas les conditions de sauvetage, une sortie de l’euro était « probable » pour la Grèce.

Alors, les banques sont-elles en sécurité ? Pour sa part, notre épargnante Magda Verouli déclare « Nous avons peur de perdre de la valeur si les euros deviennent des drachmes, mais conserver nos économies à la banque reste la chose à faire »«On ne fait pas ça pour notre gouvernement, mais pour nos contemporains », dit-elle. « Si nous ne nous aidons pas les uns les autres, nous aurons de plus gros problèmes encore. C’est vrai que c’est risqué, mais nous n’allons pas déposer notre argent chez nous comme tant d’autres. »

Dimitris Malliaropoulos, professeur de Finance à l’université du Pirée est également conseiller à la recherche économique pour l’Eurobank. Il estime que les Grecs ont encore confiance dans le système bancaire. La Grèce a reçu la moitié d’un plan de 65 milliards de dollars de recapitalisation des banques dans le cadre du plan de sauvetage de 170 milliards de dollars négocié en fin d’année dernière. Ces fonds sont prévus pour être distribués aux plus grandes banques de Grèce la semaine prochaine. « Il reste encore un gros tampon de liquidités », a-t-il précisé.

Des taux de prêts handicapants

Les banques grecques avaient besoin d’une recapitalisation après avoir subi 38 milliards de pertes sur l’année 2011, en acceptant une coupe de 53% du prix des obligations du gouvernement grec.

Dimitris Malliaropoulos explique la contrepartie qu’il peut y avoir à laisser son argent dans les banques du pays. « Les banques grecques payent des taux d’intérêt plus élevés, ce qui est compensatoire pour ce genre de risque. 5 à 6% de taux d’intérêt pour des dépôts à terme, contre environ 1% dans les autres pays européens. » Le recul des dépôts n’annonce pas une catastrophe bancaire selon lui.
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« Le système saigne, et perd progressivement des dépôts à chaque fois qu’il est question de sortir de l’euro. La banque britannique de Nothern Rock, ça c’était la panique, avec des gens qui patientaient dans des files d’attente pour retirer leurs biens. » En attendant, les recettes publiques devraient être durement touchées avant les élections, explique la Bank of America. « En raison de l’incertitude politique, les Grecs seront moins enclins à payer leurs impôts. Les recettes publiques devraient être réduites de moitié pour les mois de juin et juillet », affirme un analyste.

Dans leur magasin de location de vidéos, situé dans le quartier de GalatsiCharakaidis et Vérouli se déclarent heureux d’être propriétaires et ne pas avoir de loyer à payer. Des frais en moins… Une situation bien enviable dans cette Grèce qui sombre chaque jour un peu plus.

Global Post / Adaptation Henri Lahera / JOL Press

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