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Tsipras, Venizelos, Samaras: les Grecs hésitent

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La responsabilité est lourde pour les Grecs et rien ne laisse présager de la direction qu’ils décideront de prendre le 17 juin, à l’occasion de nouvelles élections législatives anticipées. Après l’échec de la formation d’un gouvernement après un premier scrutin organisé le 6 mai dernier, les électeurs sont de nouveau appelés à choisir leurs députés. Derrière ce simple choix, c’est l’avenir de la Grèce dans l’Europe qui est en jeu.

Les deux alternatives offertes aux Grecs

Sur la scène électorale grecque, la concurrence est rude pour séduire les électeurs. La diversité des partis élus le 6 mai en est l’exemple le plus frappant. Des néo-nazis d’Aube Dorée aux communistes du KKE, jamais le spectre politique n’avait été aussi large au sein de l’assemblée nationale et l’émergence d’une majorité s’était révélée impossible. Après plusieurs jours de tractations entre les chefs des principaux partis, réunis sous la houlette du président Karolos Papoulias, l’impossibilité de constituer un gouvernement avait conduire à la convocation de nouvelles élections.

Retour à la case départ. Pourtant, entre le 6 mai et le 17 juin, de nombreux éléments ont évolué. Si les multiples acteurs politiques du premier scrutin n’ont pas disparu, trois protagonistes principaux se disputetent désormais les faveurs des Grecs.

Autre élément nouveau, la pression extérieure, européenne surtout, qui influe sur le débat national. Les électeurs sont invités subrepticement, par la zone euro, à faire les choix qui s’imposent pour que la Grèce reste dans la zone euro. Ils sont également invités à accepter, sans broncher, la politique de rigueur qui leur est présentée comme la seule politique envisageable pour leur survie.

Les Grecs sont partagés. D’un côté, les raisonnables, « favorables » à une politique de rigueur qui pourraient sauver le pays, en échange de ces 130 milliards négociés le 27 octobre 2011 avec la Commission européenne. De l’autre, ceux qui n’ont plus rien à perdre, ceux qui sont las de cette austérité, ceux à qui on assure que le refus du Mémorandum ne conduirait d’ailleurs pas forcément à la sortie de la Grèce de la zone euro. Et puis, il y a ces 20% de Grecs, qui ne verraient pas d’un mauvais œil un retour à la drachme.

Trois hommes, trois options grecques

Pour représenter ces électeurs, trois hommes politiques aux profils différents cherchent inlassablement à convaincre du bien-fondé de leur programme.

Le Pasok (gauche) d’Evangelos Venizelos et la Nouvelle Démocratie (droite) d’Antonis Samaras ont été largement désavoués par les Grecs le 6 mai, réunissant 32,1% des suffrages contre 77,4% lors des dernières élections de 2009.

Les deux principales formations politiques du pays, qui se succèdent au pouvoir depuis le retour à la démocratie en 1974, se retrouvent sur leur volonté d’appliquer les réformes nécessaires pour respecter le Mémorandum convenu avec l’Union européenne.

Le troisième acteur s’est véritablement distingué le 6 mai dernier. Alexis Tsipras du mouvement d’extrême gauche Syriza a réussi à attirer de nombreux Grecs par ses discours appelant à la révolte contre l’austérité européenne.

Alexis Stipras, l’homme de la contre-austérité

Il fait peur à l’Europe, Alexis Stipras. Il convainc de plus en plus et certains sondages le placent en tête le 17 juin.

Si l’Europe veut mettre la Grèce à genou, Alexis Stipras semble vouloir voir l’Europe à genou devant la Grèce. « N’essayez pas de m’intimider. » déclarait-il à l’adresse de l’Union européenne, lundi 11 juin, à Athènes.

Le programme de Syriza est simple, abolir définitivement le mémorandum qui définit les mesures de rigueur que la Grèce doit mettre en place et relancer l’économie par la consommation.

« Le plan d’urgence fait déjà partie du passé. » « Il fera partie de l’histoire pour de bon dès lundi. »

A 37 ans, Alexis Stipras est sûr de convaincre et pense devenir Premier ministre dès le lundi 18 juin : « Ce dimanche, nous allons mener la Grèce vers une nouvelle ère de croissance et de prospérité. La nouvelle ère commence lundi. »

Antonis Samaras, un libéral pour sauver le Mémorandum

Face à Alexis Stipras, un déçu du 6 mai dont le virage stratégique effectué entre les deux scrutins pourrait bien lui rapporter gros le 17 juin.

Antonis Samaras, leader de la Nouvelle Démocratie, se bat pour sauver la place de la Grèce dans la zone euro et entend assainir les finances publiques par une politique de rigueur. Lors de la précédente campagne, celui-ci avait largement attaqué son ennemi de toujours, le candidat de gauche Evangelos Venizelos, chef du Pasok, également en faveur du respect du Mémorandum.

Au regard des résultats du 6 mai, Antonis Samaras a réalisé que l’ennemi n’était plus le même et Alexis Tsipras est devenu, en quelques heures, l’homme à abattre.

Pour convaincre, Antonis Samaras utilise d’abord la technique de la peur et se positionne comme le seul à avoir les clés pour assurer la place de la Grèce dans la zone euro. Il promet ensuite d’avoir les mots nécessaires pour négocier un étalement dans le temps des mesures de rigueur imposées par l’Europe.

Pour ne pas réduire les salaires, ni augmenter les impôts, Antonis Samaras veut notamment obtenir l’allongement du délai pour réaliser les 11,4 milliards d’euros de coupes budgétaires de deux ans à quatre ans.

Selon lui, les changements opérés en Europe depuis le dernier scrutin – élections françaises, crise bancaire espagnole – modifient le contexte et permettront aux Grecs d’obtenir plus de souplesse de la part des autorités européennes : « Je pense que nous avons à gagner du fait que l’Europe change. […] Cela donne plus de possibilité pour renégocier le plan de rigueur. »

Evangelos Venizelos, le premier homme devenu troisième

L’homme à qui avait été confiée la lourde charge de former un gouvernement d’union nationale au lendemain du 6 mai se retrouve dans une position très peu confortable. Evangelos Venizelos, à la tête du Pasok, est devenu le troisième homme avec cet échec et les différents sondages publiés ces dernières semaines le placent tous en troisième position.

L’alternative qu’il propose aurait pourtant pu convaincre. A gauche, Evangelos Venizelos promet de ne pas baisser les salaires, ni les pensions de retraites et de prendre des mesures pour enrayer le chômage des jeunes. Il se prononce également en faveur du Mémorandum et des mesures de rigueur nécessaires à la Grèce. Selon lui, « les propositions de Syriza conduisent la Grèce en dehors du système économique mondial ».

Une course entre Tsipras et Samaras

Evangelos Venizelos pourrait être le grand perdant de cette élection. Selon les derniers sondages publiés avant la fin de la campagne officielle, Syriza et Nouvelle Démocratie se partagent la première place. Un sondage de Public Issue donne Syriza gagnant avec 31,5% des voix (134 sièges), devant Nouvelle Démocratie avec 25,5% (68 sièges) des voix et le Pasok, 13,5% des suffrages (36 sièges).

Un autre sondage de l’institut MRB donne Nouvelle Démocratie vainqueur avec 23,9% des voix, suivi par Syriza (22,5%) et le Pasok (21,6%).

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