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Turquie: Davutoglu, un Premier ministre aux ordres d’Erdogan

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Davutoglu travaille aux côtés d’Erdogan depuis son arrivée à la tête du gouvernement (Photo: Shutterstock.com)

Jeudi 21 août, le nouveau président turc, Recep Tayyip Erdogan, a choisi son successeur à la tête du gouvernement et du parti islamo-conservateur AKP. Aucune surprise : il s’agit de son ministre des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu. Chef de la diplomatie turque depuis 2009, il est considéré comme « l’éminence grise » d’Erdogan depuis son arrivée au pouvoir en 2003.

Un intellectuel 

A peine désigné, le nouveau Premier ministre s’est placé dans la lignée de son mentor : « C’est un honneur pour moi d’être désigné à ce poste (…), je vais continuer le mouvement de restauration engagé il y a douze ans. » Il a aussi réaffirmé son entière loyauté au président : « Aucune graine de discorde ne peut être plantée entre nous », a-t-il assuré. « Notre congrès n’est pas prévu pour être le théâtre de séparations mais, au contraire, pour unifier et renforcer notre parti », a-t-il insisté. Erdogan a quant à lui salué « la détermination de frère Davutoglu ».

Très pieux, Davutoglu, 55 ans, est un universitaire et un intellectuel – pas un homme d’appareil. Sans la bénédiction d’Erdogan, il n’existerait quasiment pas sur la scène politique turque. Député de sa province natale de Konya (centre) depuis 2011, il ne devrait pas, a priori, faire de vagues. Et, comme à son habitude, c’est le « raïs » Erdogan qui tiendra la barre

Sourire en coin 

Ne pouvant briguer un nouveau mandat de Premier ministre, Erdogan s’est présenté à l’élection présidentielle – qu’il a remportée dès le premier tour, le 10 août, avec 52% des voix. Il souhaite modifier la Constitution pour renforcer les pouvoirs du chef de l’Etat, jusque-là largement honorifiques. Pour Kemal Kiliçdaroglu, leader du principal parti de l’opposition, « la Turquie est entrée dans l’ère des Premiers ministres marionnettes ».

Depuis 2003, sans jamais se départir de son sourire en coin, Davutoglu a multiplié les efforts pour faire de son pays une puissance incontournable du Proche et Moyen-Orient. Nationaliste, obsédé par l’idée de remettre Ankara au centre du monde, celui que l’on surnomme « le Kissinger de la diplomatie turque » est a l’origine de la « stratégie néo-ottomane » d’Erdogan. 

« Printemps arabe » 

C’est lui, enfin, qui a mis en place la doctrine du « zéro problème avec les voisins », en cherchant à maintenir un dialogue à la fois avec l’Union européenne, l’OTAN, la Russie, l’Iran, l’Irak, la Syrie, Israël, etc. Aujourd’hui, force est de constater l’échec de cette politique extérieure.

La faute, surtout, au « Printemps arabe ». La rupture a été consommée entre la Turquie et l’Égypte après la chute de Mohamed Morsi en juillet 2013 (Ankara soutenait les Frères musulmans). Les rapports ne sont pas meilleurs avec la Syrie de Bachar al-Assad depuis le début de la guerre civile en mars 2011 (la Turquie a soutenu les groupes rebelles).

En Turquie, on ne parle plus de « leadership » mais de « précieuse solitude » pour tenter de masquer le fiasco de Davutoglu.

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