Le journalisme est un métier difficile. Dans le domaine de la santé aussi. Pourtant, dans nos pays démocratiques et tempérés, les crises sanitaires toujours jugulées, les grandes menaces d’épidémie jamais avérées, les scandales à gros guillemets et petits effets donnent chaque jour leur grain à moudre aux Rouletabille en peignoir que nous sommes.
En réalité, on souffre bien davantage du trop que du trop peu. Et la plaie de l’abondance est en permanence rouverte par ces satanées « Journées », quotidiennement dédiées à telle ou telle thématique de santé.
Le journaliste, délivré des nécessités de l’investigation
Quand ils ne sont pas mondiaux, ces moments de théorique mobilisation peuvent aussi être nationaux et, abomination de la désolation, dépasser la durée légale de 24 heures pour connaître des prolongations pouvant atteindre la semaine, voire le mois.
Le journaliste, délivré des nécessités de l’investigation par la profusion des sources, se trouve alors en permanence confronté à l’une des principales frustrations de son métier – la hiérarchisation de l’information – et exposé à la vindicte qui découle inévitablement de ses ukases.
Peut-on mettre sur le même plan la Journée de la Femme et celle du Rein ?
Doit-on vraiment trancher aujourd’hui entre la mise en avant de la Semaine contre le cancer et celle du don de moelle osseuse, alors que le lien entre les deux thématiques est sans doute plus direct que celui des institutions qui les initient ?
Peut-on mettre sur le même plan la Journée de la Femme et celle du Rein, qui tombent le même jour ? Le vieillissement ne nous préoccupera-t-il que le 7 avril 2012 ? Ne doit-on aborder le chapitre des maladies rares que chaque 29 février ?
A-t-on le droit d’oublier la Journée mondiale d’Alzheimer et de remettre au lendemain celle de la procrastination ?
L’agenda des causes de santé est à ce point chargé qu’on recommanderait volontiers de célébrer enfin un jour sans Journée…