Le procès de Marc Machin, accusé à tort de meurtre, va être révisé. En quoi consiste un procès en révision, procédure exceptionnelle, et qui en a déjà bénéficié dans l’histoire ?
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Le procès en révision de Marc Machin, qui a passé près de sept ans en prison pour meurtre, s’est ouvert lundi 17 décembre, devant la cour d’assises de Paris. Sa condamnation pour meurtre ayant été annulée et un autre homme, David Sagno, condamné pour les faits, Marc Machin, 30 ans, devrait devenir la huitième personne en France depuis la Seconde Guerre mondiale à être acquittée d’un crime à l’issue d’un procès en révision.
Rappel des faits
En septembre 2004, la cour d’assises des Hauts-de-Seine condamne à dix-huit ans de réclusion criminelle Marc Machin, alors âgé de 22 ans, pour le meurtre de Marie-Agnès Bedot, sous le pont de Neuilly. Deux jours ont suffi à la Cour et aux jurés pour se faire une opinion sur le suspect. Son casier judiciaire est entaché d’une condamnation pour agression sexuelle, et un témoignage l’accable : une infirmière le reconnaît formellement comme celui qui l’a agressée verbalement le soir du meurtre tout près du lieu où la victime sera découverte.
Après quarante heures de garde à vue, Marc Machin avait même avoué ce crime qu’il n’avait pourtant pas commis. Un an plus tard, devant la cour d’appel de Versailles, la peine est confirmée et alourdie de douze ans de sûreté sur les dix-huit ans prononcés.
Mais en quoi consiste ce genre de procédure ?
La Cour de révision est une formation spéciale de la Chambre criminelle de la Cour de cassation française, chargée d’examiner les demandes de révision de jugements rendus en matière pénale. Elle ne peut pas être saisie directement par le justiciable, qui doit au préalable formuler sa demande de révision auprès de la Commission de révision des condamnations pénales. C’est elle qui décide ou non de transmettre le dossier à la Cour de révision.
Cette cour statue par un arrêt motivé, à l’issue d’une audience publique au cours de laquelle sont recueillies les observations écrites ou orales du requérant ou de son conseil, celles de l’avocat général et, le cas échéant, celles de la partie civile qui s’était constituée au procès dont la révision est demandée.
Un élément nouveau
La révision d’une décision pénale peut être demandée au bénéfice de toute personne reconnue coupable d’un crime ou d’un délit lorsque, après la condamnation, vient à se produire ou à se révéler un fait nouveau ou un élément inconnu de la juridiction au jour du procès, de nature à faire naître un doute sur la culpabilité du condamné.
Ainsi lorsqu’en mars 2008, un SDF de 33 ans, nommé David Sagno, se présente dans un commissariat de police pour s’accuser des deux meurtres du Pont de Neuilly et que son ADN est retrouvé sur ses victimes, jusque sous les ongles de Marie Agnès Bedot, sa culpabilité ne fait aucun doute. La procédure de révision de la condamnation de Marc Machin a donc été enclenchée, et il est sorti de prison le 7 octobre 2008, après y avoir passé six ans et dix mois. En février 2012, la Cour décide de condamner David Sagno à trente ans de réclusion criminelle pour les deux meurtres.
Qui autorise ces révisions ?
La commission de révision est composée de cinq magistrats de la Cour de cassation désignés par l’assemblée générale de la juridiction, la présidence étant assurée par un des cinq membres élus, choisi parmi les membres de la Chambre criminelle. La commission a pour mission de recevoir et d’instruire toutes les demandes en révision ainsi que les demandes de suspension de peine.
Dans l’affaire Machin, la Cour de révision a annulé, en 2010, sa condamnation à dix-huit ans de prison. Elle a cependant ordonné que se tienne un procès en révision qui a débuté, ce lundi 17 décembre, à Paris. Si on peut s’interroger sur l’utilité d’un tel procès, il permettra tout de même de démontrer l’innocence du prévenu et d’évacuer l’hypothèse d’une complicité entre Marc Machin et David Sagno.
Exemples de révision
Marc Machin devrait devenir la huitième personne en France depuis la Seconde Guerre mondiale à être acquittée d’un crime à l’issue d’un procès en révision. Avant lui, Loïc Sécher, accusé à tort du viol d’une adolescente, a été acquitté en juin 2011. Pour les sept années passées en prison, Loïc Sécher a touché une indemnisation de 797 352 euros. En 1989, Patrick Dils est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour les meurtres de deux enfants commis en 1986 à Montigny-lès-Metz (Moselle). Après un procès en révision en avril 2001, il est de nouveau condamné, à vingt-cinq ans de prison. Ce n’est qu’en 2002 qu’il est finalement acquitté en appel.
Autre exemples : en 1999, Rida Daalouche, un Tunisien, a été rejugé après avoir bénéficié d’une révision et est acquitté. Il avait été condamné en 1994 à quatorze ans de prison pour le meurtre d’un ouvrier commis en 1991 à Marseille ; Guy Mauvillain est rejugé après révision et acquitté en 1985. Il avait été condamné pour le meurtre d’une vieille dame à dix-huit ans de réclusion en 1975.
Enfin Roland Agret, condamné à quinze ans de prison en 1973 pour meurtre, obtient la révision de son procès et son acquittement en 1985, Jean-Marie Deveaux, condamné à vingt ans de prison en 1963 pour l’assassinat de la fille de ses patrons, est rejugé après révision et acquitté en 1969 et Jean Deshays, docker accusé d’assassinat est condamné à vingt ans de travaux forcés en 1949. Après révision, il sera acquitté en 1955.