Sélectionné en compétition officielle à Cannes, le film d’Abdellatif Kechiche semble avoir bouleversé la grande majorité les spectateurs. Le réalisateur franco-tunisien filme ici une histoire d’amour entre deux femmes avec une rare intensité.
[image:1,l]
La vie d’Adèle, «cinéma de demain» ?
Le film d’Abdellatif Kechiche a bien failli ne jamais être présenté à Cannes. Sélectionné à la dernière minute en compétition officielle par Thierry Frémeaux, délégué général du Festival de Cannes, le film semble bien avoir conquis la croisette depuis sa projection. Claude Lelouch, lui, a déjà fait son choix : «Si j’étais président du jury, je me laisserais bien tenter par ce genre de film, c’est vraiment le film de demain, un film qui libère les acteurs, le scénario, la caméra…Il a des parfums de cinéma de demain», a-t-il expliqué au micro d’Europe 1.
Une grande mise en scène
Alors cette histoire d’amour entre deux femmes, librement inspiré de la bande dessinée « Le bleu est une couleur chaude » de Julie Maroh, est-elle un avant-goût du cinéma de demain ? Si l’histoire n’a rien d’extraordinaire, c’est la mise en scène qui doit être saluée. Abdellatif Kechiche filme avec vérité et intensité cette romance fusionnelle et l’émotion des premières fois : premier baiser, premier acte sexuel, première rupture… En rapprochant sa caméra au plus près des personnages, le réalisateur intensifie leurs échanges, frôle la peau des jeunes femmes, leurs cheveux, laissant éclater leur sensualité.
« J’ai essayé de les filmer avec ce regard fasciné que j’ai sur l’harmonie du mouvement de ces corps, et j’espère montrer cette émotion et cette beauté que je ressens » explique au micro de France Info le réalisateur à qui l’on doit L’Esquive (2004) et La Graine et le Mulet (2007).
Education sentimentale
La vie d’Adèle (Adèle Exarchopoulos), bascule le jour où elle rencontre Emma (Léa Seydoux), étudiante aux Beaux-Arts, celle qui lui fera découvrir le désir et lui permettra de s’épanouir dans son homosexualité. Face au regard des autres Adèle grandit, se cherche, se perd, se trouve…« Cela faisait longtemps que je traînais cette idée avec moi, s’interroger ce qu’on appelle le coup de foudre, le premier désir » explique Abdellatif Kechiche lors de la conférence de presse cannoise.
Depuis sa diffusion au Festival de Cannes, la presse plébiscite ce long-métrage et surtout la prestation des actrices : Adèle Exarchopoulos, révélation féminine du Festival, et Léa Seydoux qui forment un duo charnel.
« Pas un film social »
En plein débat sur le mariage homosexuel, le réalisateur se défend de faire un film social, mais explique au contraire avoir essayé d’éviter « un contexte, un militantisme » en se concentrant davantage « sur la rencontre, la difficulté de vivre ensemble et la rupture ».
Bien que cette romance lesbienne semble avoir conquis la Croisette, une question s’impose: un jury présidé par un réalisateur conventionnel comme Steven Spielberg, osera-t-il récompensé une telle œuvre ?