Entretien avec Hubert Julien-Laferrière, vice-président du Grand Lyon en charge de la coopération internationale. Il travaille notamment sur l’intégration des Roms.
Pour Hubert Julien-Laferrière, l’assimilation des Roms à l’échelle européenne passe par une collaboration étroite entre l’Union européenne et les collectivités locales, directement concernées par la question des Roms.
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Le Conseil de l’Europe estime que plus de 6 millions de Roms vivent au sein de l’UE (Photo: Shutterstock.com)
JOL Press : La question des Roms est-elle un enjeu crucial pour les élections européennes ?
Hubert Julien-Laferrière : Il s’agit effectivement d’une problématique essentielle, même si la réponse à la question des Roms revient évidemment aux pays où ils vivent. En 2011, l’Union européenne a adopté un cadre incitant les Etats membres à mettre en œuvre des mesures pour mieux intégrer ces populations. Sur ce point, la Roumanie et la Bulgarie sont d’ailleurs régulièrement montrées du doigt. L’Europe donne aussi des moyens financiers aux Etats pour entreprendre ces politiques. Or, ces moyens sont parfois mal utilisés.
Actuellement, l’UE réfléchit à la nécessité de travailler, non pas avec les Etats, mais avec les collectivités locales de ces Etats pour mieux intégrer les Roms. Je pense que ce serait la meilleure solution car les collectivités locales sont directement concernées : lorsqu’une population qui vit dans le dénuement le plus total s’installe dans votre ville, cela a évidemment des conséquences sur l’ensemble de la commune en termes de paix sociale, de vandalisme, de questions sanitaires etc.
JOL Press : Selon vous, c’est un sujet qui doit être porté par l’Union européenne ?
Hubert Julien-Laferrière : Bien sûr. Il faut une politique européenne pour l’insertion des Roms qui implique davantage les Etats membres et les collectivités locales de ces pays. Personnellement, je souhaite que l’Union européenne travaille directement avec les maires, au moins autant qu’avec les Etats, pour mener une politique plus efficace.
Aujourd’hui, l’Europe met en place des programmes de lutte contre la pauvreté (qui ciblent indirectement les Roms). Il s’agit de fonds structurels alloués aux pays. Comme je l’indiquais plus tôt, dans certains cas, ces fonds ne sont pas utilisés car l’UE estime qu’elle n’a pas les garanties suffisantes de leur bonne utilisation. La question des Roms mobilise de plus en plus l’UE. Mais encore faut-il que les Etats, souverains sur ce sujet, acceptent de participer à une politique globale.
JOL Press : A l’échelle européenne, existe-t-il un vote rom ?
Hubert Julien-Laferrière : S’il existe une identité rom, je ne crois pas qu’on puisse parler d’un vote rom. Les Roms sont des citoyens roumains ou bulgares pour l’essentiel, avec une sensibilité politique particulière dans la mesure où ils ont des conditions de vie plutôt défavorisées.
De plus, il s’agit de populations nomades, éparpillées à travers l’Europe, qui se sont sédentarisées dans différents pays – rendant d’autant plus difficile l’émergence d’un vote rom. Du fait de leur situation souvent précaire, ce sont des gens qui n’ont pas une bonne connaissance de l’Union européenne, et encore moins des élections européennes.