Le gouvernement irlandais refuse de toucher les quelques 13 milliards en arriérés de taxes auxquels Google a été condamné à lui payer, invoquant de « graves dommages » sur sa réputation.
La guerre fiscale est déclarée entre Bruxelles et Dublin. Et la bataille promet d’être longue. LE gouvernement irlandais a en effet formellement déposé appel de la décision de l’exécutif bruxellois obligeant le fisc irlandais à réclamer à Apple la somme de 13 milliards d’euros au titre d’« avantages fiscaux indus ». Le pays dispose d’un déjà taux d’impôt sur les sociétés exceptionnellement bas selon les standards européens (12,5%) et la multinationale américaine avait bénéficié, d’après Margrethe Vestager, commissaire chargée de la politique de concurrence, d’un taux d’imposition sur ses bénéfices européens de seulement 1% entre 2003 et 2014. Il a par la suite diminué jusqu’à 0,005 % en 2014.
« Notre appel a été déposé au Tribunal de l’Union européenne », a annoncé le ministre des Finances Michael Noonan. « Le gouvernement (irlandais) est en profond désaccord avec l’analyse de la Commission européenne ». Dans le même temps, le Premier ministre Enda Kenny (centre droit) a estimé que le jugement de la Commission n’avait fait qu’occasionner « de graves dommages » à la réputation internationale de son pays. Apple s’était en effet installé en Irlande afin de bénéficier des législations plus souples en matière fiscale proposées par Dublin. Cette condamnation pourrait provoquer un exode des multinationales, et faire perdre au pays nombre de clients juteux.
Un millier de ces sociétés, principalement américaines, sont actives en Irlande. Elles emploient environ 100 000 personnes, soit 5% de la force de travail du pays. Depuis quelques années, tous les géants de la Silicon Valley ont choisi d’installer leur QG en Irlande : Twitter, Google, Facebook, Dropbox, Amazon… Mais refuser une telle somme – qui pourrait s’accompagner de redressements similaires pour d’autres compagnies – a été décrier. D’une part, pour les autres pays de l’UE, cette pratique s’apparente ni plus ni moins à du « dumping fiscal ». D’autre, la décision du gouvernement de contester la sanction de Bruxelles devant les tribunaux européens ne fait pas l’unanimité dans le pays lui-même. es 13 milliards d’euros demandés par la Commission représentent 23 % du budget irlandais. Et à cela il faut ajouter les intérêts.
La politique fiscale avantageuse irlandaise a cependant aussi ses soutiens. Barack Obama a lui-même condamné la décision de la Commission Européenne. Pour Tim Cook, PDG de la firme à la Pomme, cette décision est « une merde politique totale ». Choisissant de répondre par la polémique, celui-ci a affirmé : « Je pense que c’est Apple qui était visé ici […] Et je pense que [le sentiment anti-américain] est une raison pour laquelle nous pourrions avoir été ciblés. » Une sortie vivement critiquée par la presse européenne et américaine de concert.