Le deuxième volet de la trilogie « Patrie » du réalisateur Ameer Fakher Eldin est empreint de mélancolie et marqué par les intempéries
Il est compréhensible que Munir, un écrivain accablé par le mal de vivre et originaire d’un pays non spécifié du Moyen-Orient, choisisse les îles Hallig, éloignées de l’Allemagne, comme lieu pour mettre fin à ses jours. Ce paysage doux et aqueux offre un cadre calme et pittoresque pour les derniers jours d’une personne sur terre, bien qu’il ne soit pas assez spectaculaire ou stimulant pour renouveler complètement l’envie de vivre. Du moins, pas immédiatement. Toutefois, au fil du drame poétique et existentiel « Yunan » d’Ameer Fakher Eldin, Munir découvre progressivement plus de choses sur ce lieu – et, par extension, sur sa propre vie – qu’il n’y paraît à première vue. Comme une étude douce et progressive sur les connexions humaines interculturelles, le film est subtilement gratifiant ; un fil parallèle folklorique, qui relie le voyage du protagoniste à son héritage natif, est moins convaincant.
Présenté en compétition à la Berlinale, « Yunan » est la deuxième œuvre du projet « Homeland » de Fakher Eldin, une trilogie prévue sur le thème du déplacement. Le premier film, son premier long-métrage bien accueilli « The Stranger », était la soumission de la Palestine pour l’Oscar international en 2021. Moins impeccable que ce film, mais toujours marqué par un contrôle formel impressionnant et un poids émotionnel, le deuxième long-métrage de Fakher Eldin est une coproduction véritablement multicontinentale (Palestine, Jordanie, Canada, Allemagne, Italie et France y participent), animée par un désir poignant de foyer, ou du moins d’appartenance, depuis des rivages étrangers.
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Né en Ukraine de parents palestiniens et syriens, et maintenant basé à Hambourg, Fakher Eldin, âgé de 33 ans, ressent clairement une affinité personnelle avec le sentiment de déracinement vécu par son protagoniste – également résident de Hambourg, et solitaire de manière rapidement établie dans les premières scènes du film. Interprété par l’acteur libanais Georges Khabbaz, avec une démarche lourde et un regard lointain et constamment fatigué, Munir est présenté assis d’une manière morose dans un cabinet médical, où rien de spécifique n’est diagnostiqué au-delà d’un malaise général du corps et de l’esprit. Le médecin lui prescrit simplement du repos – une ordonnance que Munir interprète comme le signal pour une mission de suicide non pressée.
Lors d’un appel téléphonique à sa sœur et à sa mère atteinte de démence (Nidal Al Achkar) dans son pays d’origine, on apprend qu’il est un écrivain exilé, aussi étouffé créativement en Europe qu’il est affligé. Bien que sa mère ait peu de souvenir de qui elle est, il lui demande de raconter une histoire favorite de son enfance sur un berger sourd-muet (Ali Suliman) vivant isolément dans un désert – un conte quasi biblique qui prend vie dans plusieurs scènes énigmatiques et saturées de bronze, vers lesquelles l’imagination de Munir dérive régulièrement. Pourtant, l’histoire ne progresse ni ne se développe : la mère de Munir se souvient seulement de son commencement, et ces digressions commencent à refléter sa propre stase intérieure, un point que ce film déjà languissant souligne plus de fois que nécessaire.
L’intrigue réelle du film, bien que sobre, est plus captivante, alors que Munir voyage par terre et par mer vers les îles Hallig mentionnées précédemment, au large de la côte austère du nord de l’Allemagne, et trouve refuge dans une pension sans chichis dirigée par la vieille et discrètement joyeuse Valeska (Hanna Schygulla). Il est amusé par son hospitalité ironique et inévitable, notamment dans une scène amusante où elle l’invite de manière flirtante à se déshabiller près du feu après avoir été surpris par la pluie. Bien qu’il soit regardé de manière plus froide par le fils taciturne de Valeska, Karl (Tom Wlaschiha), et d’autres résidents de l’île, il n’est jamais assez seul pour utiliser le revolver dans ses bagages pour l’usage prévu.
Dans la dernière d’une série d’apparitions inattendues dans des projets d’auteurs atypiques, y compris « Peter von Kant » de François Ozon et « Poor Things » de Yorgos Lanthimos, la star allemande expérimentée Schygulla apporte à cette affaire principalement solennelle une dose bienvenue de chaleur et de légèreté, son air doux de malice complétant, et finalement colorant, la présence plus austère et mélancolique de Khabbaz. Bien qu’ils soient l’élément principal reliant les événements à l’identité native (quoique étrangement non spécifique) de Munir, les scènes de narration légèrement cryptiques manquent de ce contraste et de cette tension, finissant par peser sur un film de plus de deux heures.
Cette modeste étude sur une communauté improbable trouvée au bout du monde – ou presque – prend une envergure plus mythique alors que l’île est confrontée à une tempête périlleuse, prévue pour apporter des inondations destructrices à une échelle jamais vue depuis des éons, et cette équipe hétéroclite doit la surmonter ensemble. Avec probablement l’aide de quelques effets visuels subtils, le torrent à venir est vivement et immersivement évoqué par Fakher Eldin et le directeur de la photographie Ronald Plante, dans des panoramiques progressivement lents qui capturent les bleus métalliques et les gris belliqueux de cieux vengeurs et d’eaux agitées, ou des vents violents qui déchirent les roseaux et les herbes ondulantes. (La conception sonore alternativement rugissante et confinée de Kuen-Il Song est un atout essentiel à cet égard.) Pendant que les locaux s’inquiètent et se barricadent, Munir obtient peut-être le signe dont il a besoin d’un univers plus grand que lui, et d’une place visible pour lui dans celui-ci.
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Marc Lefebvre est un économiste et journaliste, expert en macroéconomie et marchés financiers mondiaux.