Hezbollah a annoncé vendredi soir la perte d’Ibrahim Akil, l’un de ses dirigeants, tué lors d’un bombardement israélien dans la banlieue sud de Beyrouth. Cette attaque, qui a fait au moins quatorze victimes, marque une « escalade significative » dans le conflit entre l’État hébreu et le groupe militant libanais et « augmente les craintes d’une guerre totale », selon la BBC.

« Cet assassinat conclut une semaine de bombardements à travers le Liban, ciblant les infrastructures militaires du groupe ainsi que le moral de ses membres, touchant des leaders dans des zones densément peuplées de la capitale [Beyrouth], causant morts et blessures parmi ses membres » par des explosions de bipeurs et de talkies-walkies piégés, résume le Washington Post.

« Pour Israël, qui maintient également ses forces actives à Gaza, ces opérations représentent un pari risqué : il cherche à affaiblir le Hezbollah pour permettre le retour des Israéliens déplacés dans le nord, mais il risque également d’aggraver la situation, y compris la possibilité d’une guerre régionale », analyse le journal américain.

Des actions entreprises à l’insu des États-Unis, qui ont affirmé ne jouer aucun rôle dans ces opérations et continuent de prétendre – au moins officiellement – privilégier une solution diplomatique.

« Les tensions atteignent un point critique »

« Depuis le début du conflit à Gaza il y a près d’un an, la principale préoccupation de Washington a été d’empêcher l’extension du conflit à d’autres zones du Moyen-Orient, notamment un affrontement direct entre les forces israéliennes et le Hezbollah », note El País. Car « un tel affrontement pourrait également impliquer les principaux alliés des deux parties – les États-Unis et l’Iran ».

Hélas! « Les officiels américains anticipent que les affrontements entre Israël et le Hezbollah vont s’intensifier dans les prochains jours, ce qui pourrait déclencher une guerre totale entre les deux parties », rapporte Politico.

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« Les responsables américains ont longtemps affirmé qu’Israël et le Hezbollah souhaitent éviter une guerre », ajoute le site. « Mais les tensions ont atteint un sommet suite aux attaques consécutives d’Israël contre Hezbollah au Liban cette semaine. La dernière analyse de l’administration Biden suggère qu’il sera difficile pour les deux parties de désamorcer la situation ».

Rami Khouri, chercheur à l’American University de Beyrouth, croit également que le Hezbollah et l’Iran ne peuvent pas « rester inactifs » face aux attaques de cette semaine. « Il est crucial pour eux de répondre de manière proportionnelle aux attaques menées par Israël », affirme-t-il à Al-Jazeera.

« S’ils réussissent, ils pourraient alors revenir à la situation qu’ils ont expérimentée ces dernières années – un statu quo post-guerre de 2006 au Liban », poursuit-il. « Cela ne résoudra rien sur le long terme; cela empêchera simplement que les tensions actuelles dégénèrent en guerre totale ».

« Humiliation et désarroi au sein du Hezbollah »

Selon Amos Harel, expert en questions militaires pour Ha’Aretz, « la semaine dernière a été sans aucun doute marquée par une escalade spectaculaire, augmentant considérablement le risque d’une guerre à grande échelle ».

« Cependant, à l’heure où j’écris ces lignes, il est encore difficile de prévoir une évolution inévitable des événements qui conduirait à une guerre certaine », tempère-t-il. Le fonctionnement du Hezbollah a été « sévèrement touché » et il y a « un sentiment d’humiliation et de confusion au sein des rangs [du mouvement], compliquant le fonctionnement de leur chaîne de commandement et de contrôle ».

Dans son éditorial, L’Orient-Le Jour estime que « toute cette frénésie meurtrière prouve » surtout que « la guerre s’est clairement déplacée de Gaza au Liban. Fort de sa supériorité militaire écrasante, Israël avance ses pions, augmente la pression, multiplie les provocations, estimant qu’il bénéficie d’un avantage double ». Une situation complexe pour le groupe islamiste, juge le média libanais.

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« Si le Hezbollah se contente de réagir symboliquement par des tirs de roquettes routiniers et peu efficaces, il risque une perte rapide de crédibilité », écrit le journal. « S’il franchit le pas décisif, s’il met à exécution ses menaces répétées de frapper Israël en profondeur, il plongerait alors tête première dans le piège d’une guerre totale dont l’issue semble déjà écrite d’avance ».